La réforme de l'assurance maladie : De Charybde en Scylla30/12/20092009Journal/medias/journalnumero/images/2010/01/une2161.jpg.445x577_q85_box-0%2C104%2C1383%2C1896_crop_detail.jpg

Leur société

La réforme de l'assurance maladie : De Charybde en Scylla

L'adoption par le Sénat le 24 décembre de son propre projet de loi de plus de 2 000 pages pour la réforme de l'assurance maladie, après que la Chambre des représentants a adopté le sien le 7 novembre dernier, ouvre désormais la voie à toute une série de nouveaux marchandages pour fusionner les deux projets, puis amender le projet fusionné, avant de le soumettre au vote, puis à la signature d'Obama.

De marchandage en marchandage, le projet de loi ressemble de plus en plus à un énorme cadeau aux compagnies d'assurances, qui va devoir être payé, cher, par la population laborieuse. D'ailleurs, depuis octobre dernier, le prix des actions des compagnies d'assurance maladie s'est envolé de 26 %.

Le projet du Sénat renonce à toute assurance publique qui pourrait concurrencer les assureurs privés. Il permet même à une compagnie d'assurances basée dans un État donné d'offrir dans tous les autres États des polices d'assurance conformes à la législation de l'État d'origine qui peut être plus accommodante pour les assureurs. Et puis les assureurs pourront majorer les primes de 50 % pour les personnes présentant certains facteurs de risque (tension, cholestérol....).

Le bureau des statistiques du Congrès prévoit d'ailleurs une augmentation moyenne de 15 % des primes d'assurances. Une famille aux revenus moyens dépensera 17 % de plus pour sa santé, et même 22 % de plus si l'un de ses membres est atteint d'une maladie chronique.

Quant aux industriels du médicament, ils peuvent être satisfaits de l'interdiction d'importer des médicaments !

D'après les chiffres officiels, le projet du Sénat devrait coûter à l'État fédéral 871 milliards sur dix ans, mais il va en réalité lui permettre de réduire son déficit de 132 milliards de dollars. C'est bien que d'autres vont payer. Et d'abord ceux qui sont déjà couverts par l'État fédéral : les travailleurs âgés à travers Medicare, et les personnes à faibles revenus à travers Medicaid.

Par exemple, le Sénat a éliminé de Medicare le remboursement complet des soins à domicile pour les personnes dépendantes. Il a en outre prévu la mise sur pied d'une commission chargée d'examiner tout ce qu'il est possible d'éliminer comme prétendu gaspillage dans Medicare.

Quant à Medicaid, le système est déjà tellement sous-financé que les pauvres eux-mêmes sont de plus en plus mis à contribution, alors même que de moins en moins de médecins ou d'hôpitaux acceptent de les recevoir. Le projet du Sénat prévoit que Medicaid couvre 15 millions de personnes supplémentaires sans que l'État fédéral verse aux États de quoi faire face. Plusieurs États ont déjà élevé de vigoureuses protestations.

Les travailleurs qui sont assurés par leurs employeurs s'inquiètent, car le projet du Sénat envisage de taxer très fortement les assurances qui offrent une bonne couverture médicale. La plupart des employeurs disent déjà qu'ils réduiront la couverture médicale de leurs salariés et de leurs retraités et augmenteront la part laissés à la charge des assurés plutôt que de payer la taxe.

Certains renonceront même carrément à fournir une assurance médicale à leur personnel. Le projet de loi a beau affirmer que les employeurs de plus de 50 salariés doivent fournir une assurance médicale à leurs salariés, l'amende de 750 dollars par salarié non assuré est dérisoire par rapport au prix d'une assurance qui coûte des milliers de dollars par personne.

Aucun des projets adopté par les deux Chambres du Congrès ne permet d'offrir une véritable couverture médicale à l'ensemble de la population. Cela ne concernera au maximum que 31 millions de personnes, sur les 46 millions qui ne sont pas assurées. Les assureurs toucheront leur dû pour ces millions de personnes, mais la plupart d'entre elles n'auront pas plus de moyens qu'auparavant de se soigner car, en dépit de l'assurance, cela reviendra encore bien trop cher.

Quant aux personnes qui bénéficient aujourd'hui d'une couverture médicale correcte, cette couverture va se rétrécir pour beaucoup et seuls ceux qui ont les moyens de payer très très cher pourront conserver un bon accès aux soins.

Et en plus il y a tout ceux qui, faute de pouvoir s'assurer, paieront les 750 dollars d'amende (par an (!) pour n'avoir aucune couverture médicale.

La prétendue « réforme » n'est rien qu'un racket à grande échelle de la population au profit des industriels de la santé, et en premier lieu des compagnies d'assurances.

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