France Télécom - Troyes - Plus jamais ça !18/09/20092009Journal/medias/journalnumero/images/2009/09/une2146.jpg.445x577_q85_box-0%2C104%2C1383%2C1896_crop_detail.jpg

Dans les entreprises

France Télécom - Troyes - Plus jamais ça !

Mercredi 9 septembre, lors de la réunion de service sur le site France Télécom de Pont-Sainte-Marie (petite commune qui jouxte Troyes, dans l'Aube), un salarié s'est planté son couteau de service dans le ventre après s'être entendu confirmer qu'il était l'un des deux salariés du site qui devaient changer d'activité, passant du secteur s'occupant d'entreprises à celui des particuliers.

Il s'est écroulé dans les bras de ses collègues, complètement surpris et bouleversés. Il a été admis à l'hôpital et sa vie n'est pas en danger. Tous ceux qui ont appris cette tentative de suicide, parfois même par les médias, ont cessé le travail pour rejoindre le site.

Le lendemain, jeudi 10, beaucoup se sont retrouvés devant le portail d'entrée du site en compagnie de l'épouse du collègue hospitalisé, à l'occasion de la journée de grève lancée nationalement par plusieurs syndicats, justement pour dénoncer les « méthodes de management ». Pas de badges ou drapeaux, pas d'assemblée générale. Seulement deux affiches apposées à l'entrée reliaient les suicides et les suppressions d'emplois. S'il y avait des secteurs faisant grève à 100 %, il est difficile ici de le mesurer car même ceux qui sont en préretraite sont comptabilisés dans les effectifs. Mais très peu de salariés sont passés par ce portail avec un véhicule de service affublé du sigle Orange. Devant les médias (télévisions, radios et journaux très nombreux) qui n'avaient pas été autorisés à pénétrer sur le site, les discussions revenaient sur la surprise causée par ce geste désespéré, mais aussi sur le ras-le-bol des tracasseries administratives, des pratiques méprisantes de la part de l'encadrement, irrationnelles même, car multipliant la désorganisation de services, avec pour résultat l'isolement, l'écoeurement, la révolte. Mais aussi le « Plus jamais ça ».

Cette journée d'action à l'échelle du pays, le lendemain d'une tentative de suicide, n'est pas une simple coïncidence avec le drame vécu ici. Car cela fait des années que cela dure. Depuis la coupure des PTT avec d'un côté les télécoms et de l'autre La Poste, depuis la marche forcée dans la privatisation du secteur des télécommunications, nombreux sont ceux qui ont été mis au placard ou mutés contre leur gré, les effectifs passant de 160 000 à 100 000 salariés.

Cette fois, la direction avait annoncé avant les vacances son projet de modifier à nouveau quinze postes sur la région, sans préciser les services concernés. Beaucoup ont passé de très mauvaises vacances avec cette perspective de mutation à la rentrée de septembre. Les méthodes pour désigner les victimes varient, les arguments aussi. Cela se fait parfois par téléphone, cette fois c'est sur le site lors d'une réunion du service concerné. Cela peut être : « Vous êtes particulièrement compétent, mais il est indispensable de réduire le personnel, alors vous êtes le mieux disposé à pouvoir vous adapter à de nouvelles tâches et même progresser dans un secteur appelé à se développer. » Ou parfois : « Vous n'avez plus de possibilité d'évolution dans le service actuellement », quand ce n'est pas une critique des compétences au regard des évolutions techniques. L'objectif est toujours le même : réduire le personnel, supprimer des emplois, en brisant les résistances, en cassant les équipes... pour les profits de Télécom.

À la suite de cette mobilisation, la direction de France Télécom a finalement annoncé au Comité national santé, hygiène, sécurité et conditions de travail que toutes les mutations en cours étaient suspendues jusqu'à la fin octobre et que les moyens destinés à les accompagner (RH de proximité, médecins du travail, assistantes sociales) allaient être augmentés. Sauf que les salariés de France Télécom, en butte aux restructurations incessantes et à des mobilités forcées, n'ont aucune raison de faire confiance à ces gens chargés avant tout de faire passer les décisions prises en haut lieu, mais pas de se préoccuper réellement de la santé des salariés.

Partager