Allemagne : Les turpitudes de la continuité de l'État16/07/20092009Journal/medias/journalnumero/images/2009/07/une2137.jpg.445x577_q85_box-0%2C104%2C1383%2C1896_crop_detail.jpg

Dans le monde

Allemagne : Les turpitudes de la continuité de l'État

Selon l'édition allemande du Financial Times, les pouvoirs publics de la République fédérale emploieraient quelque 17 000 anciens agents de la Stasi, ce qui cause quelque émoi.

La presse se dit « surprise » d'une telle nouvelle à l'approche du vingtième anniversaire de la chute du mur de Berlin. Et plusieurs associations, dont une « association des victimes du stalinisme », ont protesté et manifesté leur indignation.

Un député social-démocrate, Stephan Hilsberg, ex-dissident du régime est-allemand, nuance : « Ce qui est inacceptable, c'est que certains occupent des positions hiérarchiques ».

De son côté, la police judiciaire fédérale (BKA) a reconnu qu'au moment de la réunification, elle avait recruté 48 hauts responsables de la Stasi, dont 23 sont toujours à son service. Un de ces derniers assure même la sécurité de la chancelière Angela Merkel, elle-même originaire d'Allemagne de l'Est.

Le caractère fédéral de l'État allemand a aussi engendré quelques discordances. Tandis que le Brandebourg embauchait 200 anciens agents de la Stasi, la Saxe a limogé plus de 1 000 policiers qui avaient collaboré avec la Stasi.

Est-il plus étonnant que la République fédérale allemande ait pu recruter des anciens de la Stasi alors que, dès la Deuxième Guerre mondiale, la RFA avaient recruté nombre d'anciens nazis ? Elle ne fut pas d'ailleurs la seule, les services américains, qui se préparaient à la future guerre froide, firent une moisson de telles recrues, dont un certain Barbie.

Et cette propension à recruter du personnel de l'ancien régime n'est pas proprement allemande. L'État français a lui aussi recyclé des hauts fonctionnaires compromis avec le régime de Vichy. Un seul juge et les magistrats d'origine juive révoqués n'avaient pas prêté serment à Pétain. Il n'était pas question pour de Gaulle de se passer de juges et de magistrats. L'épuration fut donc plus que symbolique. C'est ainsi que dans les sommets de l'appareil d'État, des Maurice Papon, ex-secrétaire général de la Préfecture de Gironde, et reconnu à ce titre complice de la déportation de 1 650 hommes, femmes et enfants juifs, et bien d'autres purent faire carrière après la chute de Vichy.

Ce sont là les formes concrètes, certes peu ragoûtantes, de la continuité de l'État ! Mais personne ne semble s'interroger sur l'impunité de la plupart des chefs des grandes entreprises qui s'accommodent de tous les régimes, du moment que leurs intérêts sont bien servis. Ainsi, pour s'en tenir à la firme allemande Krupp-Thyssen qui prospère ici même dans la gestion des ascenseurs d'habitation collective, ses anciens patrons n'ont pas été inquiétés plus que cela pour avoir porté en 1933 leur choix politique sur un certain Hitler.

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