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- Lutte ouvrière n°2134
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Dans les entreprises
Procès AZF - Toulouse : Total et son PDG sur la sellette
Un avocat a produit les procès verbaux des réunions du Comité d'établissement de l'année 2001. Les dirigeants de l'usine de Grande Paroisse avaient toujours refusé de les fournir. Il a fallu qu'un membre du CE, ex-salarié, les transmette il y a quinze jours, pour prouver, si c'était encore nécessaire, la responsabilité directe de Total dans la situation de sa filiale. Dans ces PV, la politique de Total était dénoncée par les représentants des salariés, mais approuvée ou commentée par le directeur de l'usine comme étant des ordres venant d'en haut, incontournables et applicables.
L'avocat de la CGT a dénoncé ce système Total, opaque et fait d'économies sur tout et en particulier sur les règles de sécurité. Il a établi le rôle central du PDG de Total à l'époque, Thierry Desmarest, et sa responsabilité dans les mesures qui ont conduit à la catastrophe.
Et puis, comme disait une avocate : « Total après l'explosion on les voyait partout. Derrière chaque porte qu'on ouvrait il y avait Total, les avocats de Total, les représentants de Total, les experts de Total, la commission d'enquête de Total. Partout... sauf dans l'instruction » réalisée par la justice. Pour conclure « il faut accuser Total, tout simplement parce que Total s'est toujours défendu ».
Un des sinistrés, porte-parole après l'explosion du "Collectif des sans-fenêtres", et à l'initiative de la citation directe contre Total et son PDG de l'époque Desmarest a notamment déclaré :
« Nous étions une centaine de sinistrés à nous être émus des conclusions de l'enquête qui évitaient la mise en examen de ceux que nous considérions comme les véritables responsables de l'usine AZF, à savoir monsieur Thierry Desmarest et Total SA.
Nous avons donc pris la responsabilité d'utiliser la procédure de la citation directe.
(...) Ce qui est insupportable, que les responsables refusent d'assumer leurs erreurs, qu'ils se bardent dans des certitudes virtuelles sur une usine rêvée où tout est rose, quand les questions sont suffisamment générales, et qu'ils se défaussent sur leurs subordonnés quand la faute est avérée.
(...) Parce que c'était insupportable de penser que les exécutants puissent être punis, alors que les donneurs d'ordre n'étaient même pas interrogés.
(...) D'un point de vue économique, on a affaire à une gestion intégrée, à des comptes consolidés réalisant la fusion de tous les comptes au niveau mondial des mille usines du groupe. Par contre du point de vue juridique, on se heurte à de multiples sociétés-écrans, ainsi a-t-on appris qu'il persistait une société Elf, une des poupées russes intermédiaires dont on ne voit pas bien le rôle à part contribuer à l'opacité générale, à part diffuser les responsabilités.
Mais Thierry Desmarest et Total SA ne se sont pas contentés d'envoyer en aveugles des directives sur leurs mille usines dans le monde.
Après l'explosion, les liens sont devenus beaucoup plus visibles. Il a bien fallu sortir du bois. (...) Après que la politique qu'ils ont imposée se soit traduite par la catastrophe, ils sont venus, ils sont intervenus, ils ont pris des décisions dans l'urgence, ils ont ouvert des lignes de crédits illimités, ils ont mis en place sans délai la commission d'enquête interne. C'est certes une obligation légale. Mais il y a une autre obligation légale, c'est de participer à la manifestation de la vérité. Une enquête ne peut pas avoir pour but de dissimuler des preuves.
Je vous rappelle que les documents de la Commission d'Enquête Interne ont été cachés à l'enquête judiciaire, et qu'ils n'ont été retrouvés que parce que le commissaire Saby a demandé une commission rogatoire, que parce qu'il a effectué une perquisition qui s'est couronnée de succès, et vous savez où, au siège de Total dans la tour de Paris-la Défense.
(...) La branche chimie du groupe Atofina était en déficit, et devait effectuer des économies pour se redresser. Elle sous-traitait tout ce qui n'était pas la production, et revoyait à la baisse les contrats de sous-traitance tous les trois ans. C'était cela la règle. Et cette règle (...) était imposée par le groupe Total.
(...) Aussi le seul vrai responsable, c'est le PDG, c'est celui qui concentre tous les pouvoirs entre ses mains. C'est monsieur Thierry Desmarest. »