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Irlande du Nord : Les attentats nationalistes, symptômes des carences du processus de paix
Le premier attentat, contre la caserne d'Antrim, dans lequel deux soldats britanniques en instance de départ pour l'Afghanistan ont trouvé la mort, a été revendiqué par l'« IRA Véritable » (Real IRA). Il s'agit d'une scission de l'IRA (Armée Républicaine Irlandaise) formée en 1997, qui fut responsable du dernier attentat sanglant des « Troubles », qui causa la mort de 29 passants à Omagh, en 1998.
Le second attentat - une embuscade visant des policiers, qui a causé la mort de l'un d'entre eux - a été revendiqué par l'« IRA Continuité ». Il s'agit de l'aile militaire du Republican Sinn Fein, autre scission du mouvement nationaliste, formée en 1987 par des personnalités connues de ce mouvement.
Depuis la signature de l'« accord de paix », en avril 1998, les attentats sanglants qui avaient marqué la période précédente avaient sans doute disparu. Le gros des groupes armés, nationalistes aussi bien que loyalistes (partisan du maintien de la province dans le Royaume-Uni) avaient troqué leurs armes contre de confortables sinécures au sein du nouvel appareil d'État provincial mis en place par Londres. On avait même vu le « pape » de l'aile la plus bigote du loyalisme, le révérent Ian Paisley, prendre la tête des affaires provinciales aux côtés de Martin McGuinness, l'ancien chef de la brigade de l'IRA à Derry.
Mais derrière cette « paix » de façade, nombre de groupes paramilitaires des deux camps, laissés pour compte dans la répartition des subventions de Londres, ont continué à exister. Certains ont sombré dans le gangstérisme pur et simple, tandis que d'autres, dont ces deux scissions de l'IRA, ont maintenu une existence plus ou moins clandestine, ponctuée d'« actions armées » largement symboliques et sans grandes conséquences.
Surtout, ces onze années de « paix » ont été ponctuées par des affrontements sporadiques dans les quartiers ouvriers, opposant des bandes de jeunes dont les rancoeurs sont alimentées par une pauvreté qui n'a jamais disparu. Or, aujourd'hui, le boom dans la construction et le secteur para-public lié aux subventions du « processus de paix » a implosé sous les coups de la crise, ramenant le chômage à un niveau proche des années 1970.
C'est d'ailleurs sans doute pourquoi, pour la première fois depuis la fin des années 1990, des renforts de forces spéciales britanniques ont été affectés en février au maintien de l'ordre en Irlande du Nord, tandis que le vrombissement assourdissant des hélicoptères de surveillance a recommencé à se faire entendre la nuit au-dessus des quartiers pauvres de Belfast.
Sans doute les groupes nationalistes dissidents auteurs des attentats récents cherchent-ils ainsi à se positionner dans l'espoir de capitaliser le mécontentement des quartiers pauvres. Mais leur nationalisme étriqué et le terrorisme imbécile qu'ils prônent, qui ne peut qu'alimenter les haines dans les rangs mêmes des classes pauvres, n'ont rien à voir avec leurs intérêts.
S'il y a un combat à mener, en Irlande du Nord, et il y en a un dont la crise actuelle ne fait que raviver l'urgence, c'est un combat qui vise à unir les rangs du prolétariat contre tous les exploiteurs, anglais et irlandais. Le prolétariat d'Irlande du Nord a déjà payé d'un prix exorbitant l'absence d'une telle politique, celui de milliers de victimes dont la mort n'aura servi qu'à porter au pouvoir ses pires ennemis.