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Leur société
Ensisheim (Haut-Rhin) : Les prisonniers d'Action Directe et l'acharnement de l'État
Samedi 21 février, près d'une centaine de personnes se sont rassemblées devant la prison d'Ensisheim dans le Haut-Rhin pour demander la libération de Georges Cipriani, l'un des deux derniers prisonniers d'Action Directe encore en prison. Voilà vingt-deux ans qu'il est embastillé pour le meurtre du général Audran et du patron de Renault, Georges Besse, en 1985 et 1986.
Cipriani a accompli la peine incompressible de sûreté de dix-huit ans et pourrait tout à fait bénéficier d'une libération conditionnelle, qui lui a été refusée par la Justice à deux reprises. Une nouvelle demande est en cours. Mais, comme le disait Madeleine Aubron, mère de l'ancienne détenue d'Action Directe Joëlle Aubron décédée peu après sa sortie de prison : « Il a fait son temps. S'il n'est pas libéré, c'est parce qu'il ne s'est pas repenti, et c'est cela que l'État lui reproche. » Georges Cipriani a payé pour les faits qu'on lui reproche. Mais l'État lui reproche encore de ne pas avoir renié ses convictions, tout comme pour Jean-Marc Rouillan dont la semi-liberté a été annulée en octobre dernier à la suite d'une interview à L'Express.
L'État a la rancune tenace envers ceux qui contestent l'ordre établi, alors qu'il est très clément envers les crimes, d'une tout autre nature, de certains de ses serviteurs. Souvenons-nous de Papon, condamné en 1998, plus de cinquante ans après les faits, à dix ans de prison pour avoir été complice de l'envoi à la mort de 1 690 Juifs, alors qu'il était haut fonctionnaire dans le régime de Vichy. Relâché quatre ans plus tard, sa responsabilité dans le massacre de centaines d'Algériens le 17 octobre 1961, alors qu'il était préfet de Paris, n'a, elle, même pas fait l'objet d'un jugement.
L'État a su faire preuve de mansuétude aussi envers les généraux de l'OAS, responsables du putsch d'Alger d'avril 1961. Emprisonnés quelques années, relâchés, puis amnistiés par de Gaulle en juin 1968, ils furent rétablis dans leurs droits en 1982 par Mitterrand pour qui : « Il appartient à la nation, au bout de vingt ans, de pardonner ». L'OAS, à la tête duquel se trouvait le général Salan, était pourtant responsable de 1 500 assassinats, commis pour la plupart entre mars et juin 1962.
La clémence de l'État est décidément à deux vitesses.
Voilà pourquoi en tout cas, et bien que les méthodes de terrorisme individuel employées par Action Directe soient totalement étrangères au courant communiste révolutionnaire que nous représentons, Lutte Ouvrière appuie la demande de remise en liberté des militants d'Action Directe sur lesquels s'acharne l'État français.