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- Lutte ouvrière n°2108
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Editorial
Ce qu'ils appellent "relance de l'économie", c'est relancer les bénéfices
L'affaire Madoff n'a pas fini de faire des vagues, surtout du côté des banques et des particuliers assez riches pour pouvoir perdre plusieurs centaines de millions d'euros. Madoff, c'est cet ex-président de la Bourse des États-Unis spécialisée dans les affaires de haute technologie. Il avait réussi à monter une gigantesque escroquerie en promettant des rendements aussi élevés que stables à ceux qui plaçaient leur argent chez lui. Il se contentait, en réalité, d'utiliser l'argent frais apporté par les dernières vagues de spéculateurs pour payer leurs intérêts aux vagues précédentes. Résultat : 50 milliards de dollars perdus, un record toutes catégories !
Autre originalité de l'affaire : les victimes ne sont pas seulement de petits boursicoteurs, mais de grandes banques, de grands fonds de placement, qui se sont fait avoir comme des bleus. Il faut croire que l'appât du gain rend aveugle.
Les grandes banques, entre autres Natixis et BNP Paribas en France, invoquent pour leur défense que ce ne sont pas elles mais des intermédiaires qui ont placé leur argent chez Madoff. Cette explication est destinée à rassurer leurs clients mais elle ne change rien au fait que, même en pleine tempête financière, ces banques comme de riches particuliers continuent à placer leur argent dans des opérations financières, et pas dans l'investissement productif susceptible de créer des emplois et de " relancer " l'économie.
Pourtant, tous les dirigeants de ce monde n'ont que le mot " relance " à la bouche. C'est au nom de la relance que la banque centrale américaine en est à prêter de l'argent aux banquiers au taux sans précédent entre 0 et 0,5 %, ce qui signifie qu'avec l'inflation, elle prête à perte. Les banques profitent de l'aubaine mais elles placent l'argent là où c'est rentable pour elles, pas là où c'est utile pour l'économie.
Pour compléter sa générosité vis-à-vis des banquiers, Bush vient d'offrir une subvention à General Motors et Chrysler, d'un montant de 13,4 milliards de dollars. L'argent offert à ces deux constructeurs l'a été en contrepartie d'une réduction de salaire de 20 à 40 %. Ce qu'ils appellent " aide à l'industrie de l'automobile " est une aide aux patrons de l'automobile, mais au détriment des travailleurs du secteur.
Sarkozy, de son côté, a récemment réuni les grands patrons de l'automobile pour leur parler d'un " nouveau plan de relance " dont le montant ne sera connu qu'en janvier. Qu'est-ce que ces sommes versées aux entreprises de l'automobile changeront au sort des travailleurs ? Qu'est-ce qu'elles changeront pour les intérimaires déjà mis à la porte ? Et pour ceux dont le licenciement est déjà annoncé ? C'est ainsi que Valeo, en tant qu'équipementier automobile, compte bien profiter du " nouveau plan de relance ". En même temps, il annonce le licenciement de 1 600 de ses travailleurs en France, alors pourtant que l'entreprise est bénéficiaire et les dividendes en hausse.
Si la préoccupation du gouvernement était de relancer l'économie, et pas seulement de venir en aide aux patrons et aux banquiers, il y a bien des domaines où les besoins sont immenses. Avec l'argent semé aujourd'hui à tout vent, l'État pourrait financer des productions utiles, voire indispensables.
Il en est ainsi pour le logement. Les SDF morts de froid rappellent à quel point la promesse de Sarkozy était mensongère lorsqu'il s'était engagé à ce que, d'ici deux ans de présidence, plus personne ne soit obligé de dormir sur le trottoir ! Mais il y a aussi tous ceux - et ils sont trois millions - qui vivent dans des logements insalubres ou dans des taudis infâmes.
Au mois de février 2008, la ministre du Logement avait promis des " maisons à 15 euros par jour ", c'est-à-dire à 100 000 euros environ, remboursables en vingt ans. En cette fin décembre 2008, la ministre se pavane pour en avoir livré... deux !
Avec un tiers des 300 milliards d'euros de crédits promis aux banques, il serait possible de construire en trois ans les trois millions de logements populaires qui manquent dans ce pays. C'est-à-dire satisfaire un besoin vital tout en relançant l'économie.
Mais satisfaire ce besoin vital ne préoccupe pas le gouvernement. Sa seule préoccupation est de permettre au patronat et aux banquiers de traverser la tempête financière avec le moins de dégâts possible pour eux-mêmes et de continuer à verser des dividendes conséquents à leurs actionnaires. Jusqu'à ce que les salariés, les classes populaires, en aient assez de payer pour une crise dont ils ne sont en rien responsables !
Éditorial des bulletins d'entreprise du 22 décembre