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Dans le monde
Grèce : La police assassine
C'est samedi soir 6 décembre à Athènes que l'étudiant Alexandros Grigoropoulos, âgé de 15 ans, a été tué par un policier. Il se trouvait avec d'autres jeunes dans le quartier central d'Exarchia, quand ils se sont querellés avec des policiers en voiture. Probablement, durant ces discussions animées, quelques bouteilles ont-elles volé. Alors que l'altercation semblait terminée, deux policiers sont descendus de la voiture et se sont dirigés de nouveau vers le groupe de jeunes. Un policier aurait alors fait feu, laissant le jeune homme agonisant sur le pavé.
Selon les témoins oculaires, il n'y aurait eu envers le policier aucune menace réelle qui puisse justifier l'usage des armes : le jeune aurait été assassiné à froid. La nouvelle a fait en quelques instants le tour de la Grèce et, déjà en fin de soirée, de nombreux jeunes manifestaient leur indignation dans la rue.
Le ministre de l'Intérieur Prokopis Pavlopoulos a présenté sa démission, aussitôt repoussée par le Premier ministre. Les milieux gouvernementaux, après avoir assuré que « toute la lumière » serait faite sur l'événement, ont commencé à répandre la thèse expliquant l'homicide par le « mauvais caractère » et « la situation psychologique » du policier, tout en le décrivant aussi comme un « professionnel sérieux, père de trois enfants ». Mais l'explication est plutôt à rechercher dans l'usage et la formation de la police tels que l'État les conçoit pour avoir un corps apte à maintenir « l'ordre démocratique », tel qu'on appelle celui-ci depuis que la dictature militaire des colonels s'est écroulée en 1974.
Le jour suivant, dimanche 7 décembre, le SY.RIZ.A, une coalition de gauche qui a recueilli 5 % aux dernières élections et est représentée au Parlement, se retrouvait avec d'autres organisations devant le musée archéologique national pour protester. La participation était massive, démontrant que des couches importantes de la population, émues par cet épisode barbare, étaient disposées à exprimer leur colère. Quelques minutes après le départ du cortège des groupes de jeunes, ceux que les médias définissent comme appartenant au mouvement « anti-pouvoir », s'en sont détachés et ont commencé à briser des vitrines, à mettre le feu à des voitures et des boutiques, à détruire des banques et des supermarchés, apparemment convaincus que c'était là le meilleur moyen de combattre le « pouvoir ». Le cortège n'a pas résisté. Pris entre l'action des groupes « anti-pouvoir » et la réaction violente de la police, il s'est dissous rapidement. Jusque dans la soirée le centre d'Athènes est devenu un champ de bataille entre ces groupes et la police.
Les manifestations ont continué le lundi, touchant les principales villes grecques. Dès le matin, les étudiants sont descendus dans la rue et l'après-midi les manifestations de protestation ont eu lieu à Salonique et Athènes. Dans cette dernière ville a eu lieu une manifestation des différentes organisations de gauche tandis que le parti communiste KKE, comme c'est sa tradition, préférait manifester de son côté.
Mardi 9 décembre encore, une grande manifestation d'étudiants et d'enseignants avait lieu, ces derniers ayant déclaré une grève de trois jours. En même temps se déroulaient non loin de là les funérailles du jeune Alexandros. De nouveau des affrontements avaient lieu avec la police.
Parallèlement à ces manifestations avaient lieu de nouveaux incidents, des saccages, des attaques à des postes de police, des incendies, apparemment de façon encore plus intense que les jours précédents. La participation de couches de la jeunesse à ce type d'actions, qui souvent ont lieu également aux côtés des manifestations syndicales, est certainement un révélateur de la façon dont la crise économique, le chômage, la précarité du travail, peuvent désespérer bien des jeunes ; même si les actions auxquelles ils se livrent n'ouvrent malheureusement pas plus de perspectives.