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Leur société
Ceux qui font des affaires en temps de crise
Le rachat pour 15 milliards d'euros de la société de banque et d'assurances Fortis, en Belgique et au Luxembourg, par BNP Paribas vient de rappeler que la crise fait le bonheur de certains grands groupes capitalistes. Et ils ne manquent pas de liquidités pour s'offrir tout ce qui passe à leur portée.
Par ce rachat, BNP Paribas devient la première banque de dépôts européenne. Et à prix bradé puisque, pour mettre la main sur Fortis dont la valorisation boursière avait chuté de 70 %, la BNP n'a sorti que 5,5 milliards d'argent frais, le solde venant sous forme d'échange d'actions. De plus, juste avant de céder Fortis qu'ils venaient de nationaliser en partie, les États belge et luxembourgeois y avaient injecté 11,2 milliards d'argent public : un matelas semblant mis là tout exprès pour que la BNP s'y allonge.
Quant à Fortis Pays-Bas, nationalisé par l'État néerlandais à 100 % (cela a coûté 16,8 milliards d'euros aux contribuables) dans l'attente de repreneurs, cela en fait déjà saliver plus d'un. La BNP, encore elle, le mastodonte bancaire néerlandais ING, la Royal Bank of Scotland rivalisent notamment autour d'ABN Amro, filiale financière de Fortis Pays-Bas, la Deutsche Bank en ayant déjà récupéré 10 %...
En Europe, on peut aussi citer le cas de Banco Santander, une des toutes premières banques de la zone euro, qui vient en deux semaines de racheter deux groupes bancaires britanniques, et surtout leur réseau : Bradford & Bingley et Alliance & Leicester. Ou encore de l'assureur allemand Allianz qui vient de s'offrir pour 2,5 milliards de dollars la société financière Hartford.
Les spéculateurs internationaux misent actuellement sur la monnaie du Japon. Le niveau élevé du yen aide les conglomérats financiers nippons à faire leur marché. Mitsubishi UFJ, seconde plus grande banque mondiale en termes d'actifs, a raflé 21 % de Morgan Stanley, numéro 2 des banques d'investissement américaines. Sumitomo Mitsui a pris pied pour des centaines de millions de dollars chez Goldman Sachs, première banque d'affaires américaine. Quant à Nomura, il a racheté toutes les activités asiatiques, européennes et moyen-orientales de la banque américaine Lehman Brothers.
De Lehman Brothers on dit d'ailleurs que sa faillite a été précipitée par le géant américain JP Morgan Chase. Celui-ci, qui avait déjà racheté au printemps la cinquième banque de Wall Street, Bear Stearns, qui était à court de liquidités, vient de s'en offrir une autre pour près de deux milliards de dollars, Washington Mutual dont les actifs sont estimés à 300 milliards !
Aux États-Unis encore, le numéro 1 mondial de la banque, Citigroup, voulait racheter pour une bouchée de pain le sixième établissement bancaire du pays, Wachovia. Wells Fargo l'ayant emporté en surenchérissant un peu, Citigroup lui réclame 60 milliards de dommages et intérêts !
Mi-septembre, Bank of America, elle, avalait la troisième société de Bourse du pays, Merril Lynch, pour 50 milliards de dollars. Cela lui permet notamment de récupérer la moitié du fonds d'investissements BlackRock et de son portefeuille estimé à 1 400 milliards de dollars !
Mettant à profit la crise, le monde de la finance est lancé, en Europe, en Asie et en Amérique, dans un processus de concentration sans précédent. À tel point qu'aux États-Unis vient d'apparaître l'expression « Big Three » (les « Trois Grandes ») pour désigner les super-géants Citigroup, Bank of America et JP Morgan Chase qui monoplisent de fait ce secteur.
Les dirigeants des États sont au chevet des banquiers et autres spéculateurs qui risqueraient d'être victimes de leur propre jeu, et présentent pour ce faire une addition sans fin aux contribuables et aux travailleurs. Mais pendant ce temps, le monde du capital continue à faire des affaires très profitables.