"Démocraties populaires" et force centrifuge20/08/20082008Journal/medias/journalnumero/images/2008/08/une2090.jpg.445x577_q85_box-0%2C104%2C1383%2C1896_crop_detail.jpg

Dans le monde

"Démocraties populaires" et force centrifuge

Les pays qu'on appelait les " Démocraties populaires " avaient bien des traits en commun. Et d'abord le fait d'être nés des mêmes circonstances. Situés dans la zone d'influence de l'URSS, telle que l'avaient délimitée les accords de Yalta et de Potsdam, leur appareil d'État avait été reconstruit dans une large mesure avec le personnel des régimes qui avaient précédé l'occupation soviétique. Ils avaient connu un certain pluralisme politique jusqu'au début de la guerre froide. Mais le risque de les voir céder aux sirènes de l'impérialisme américain et de son plan Marshall avait amené la bureaucratie du Kremlin à diminuer le poids politique et économique des anciennes classes dirigeantes. Les dictatures policières ainsi mises en place avaient même été épurées d'un grand nombre de dirigeants communistes soupçonnés de ne pas être inconditionnellement fidèles à Staline. Certains avaient même été éliminés physiquement lors des grands procès de l'époque 1948-1952. Mais cela n'avait pas supprimé pour autant l'attraction que l'Occident pouvait exercer sur ces États.

La mort de Staline, en mars 1953, et la guerre de succession qu'elle avait ouverte à Moscou avaient créé une instabilité du pouvoir tant au Kremlin qu'à la tête des Démocraties populaires, en même temps que des espoirs de changement parmi les masses populaires, qu'illustrèrent les manifestations des travailleurs du bâtiment de la Stalinallee, à Berlin-est, en juin 1953.

Le deuxième choc fut le rapport Khrouchtchev, en mars 1956, et sa dénonciation - même si elle était à l'intention de la couche dirigeante de l'URSS - d'une partie des crimes de Staline. Les aspirations des masses à plus de liberté, et le désir des dirigeants des partis dits communistes d'Europe centrale d'assouplir la tutelle de Moscou, avaient caractérisé cette même année les événements de Pologne et de Hongrie.

En Pologne, le mouvement avait mis en branle de larges couches de la population, forçant Khrouchtchev et ses collègues du Politburo à accepter un compromis avec le retour au pouvoir d'un stalinien qui avait connu les prisons du régime quelques années plus tôt : Gomulka. Ce passé lui valut d'être promu " réformateur " national. Un " réformateur " qui permit à la bureaucratie soviétique de reprendre la situation en main.

En Hongrie, la situation fut plus explosive. Des travailleurs manifestèrent, puis répondirent à la répression par l'insurrection. Ils constituèrent alors des Conseils ouvriers qui, à l'échelle parfois de régions, s'étaient mis à incarner l'autorité. Et il fallut l'intervention sanglante des chars russes pour écraser cette révolution. Là aussi, pour perpétrer sa domination sur le pays, Khrouchtchev et ses acolytes portèrent au pouvoir un dirigeant qui avait connu les prisons de l'époque stalinienne, Kadar. Mais prudemment ils lui concédèrent une certaine liberté de manoeuvre.

De nouveau, à la fin des années soixante, un vent de nationalisme s'affirmant contre l'allégeance à Moscou souffla sur les sommets du pouvoir en Pologne avec le général Moczar, en Roumanie avec Ceaucescu, qui en 1969 reçut en grande pompe le président des États-Unis, Nixon, à la barbe des dirigeants soviétiques. Ceaucescu avait d'ailleurs été le seul dirigeant d'un pays de l'Est à condamner l'intervention russe en Tchécoslovaquie l'année précédente.

Les forces centrifuges qui agitaient périodiquement les Démocraties populaires ne pouvaient manquer de l'emporter dès lors que l'Union soviétique elle-même se disloquerait.

Partager