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Leur société
Les logements en trompe-l'oeil de la loi Boutin
La ministre du Logement, Christine Boutin, a présenté en conseil des ministres son avant-projet de loi dit de « mobilisation pour le logement et la lutte contre l'exclusion ». Des associations d'aide aux mal-logés considèrent ce projet comme une « régression ». Et c'en est bien une.
Face à la crise du logement - 3 millions de mal-logés, 1,3 million de personnes en attente d'un logement social et des centaines de milliers de sans-domicile - cette mobilisation serait effectivement nécessaire. Et depuis pas mal de temps.
Cette nouvelle loi - la cinquième en cinq ans - présente comme solution la « maison à 15 euros par jour » ! Le ministère dit espérer que 5 000 de ces maisons seront « vendues » en 2008, puis 10 000 en 2009, date à laquelle le dispositif sera étendu à l'habitat collectif. Même si ce projet tenait ses promesses, les objectifs du gouvernement sont insignifiants par rapport à la situation.
L'accès des couches populaires à la propriété est présenté comme l'unique issue à la crise du logement. Les maisons Borloo à 100 000 euros sont restées dans les limbes. Celle à 15 euros par jour de Boutin promet-elle mieux ? C'est plus que douteux. Il faudra tout d'abord débourser 450 euros mensuels pour y accéder, 120 000 euros sur 20 ans ou plus, pour payer le bâti, sans compter le terrain, et tous les frais annexes découlant d'un logement mal situé, pour devenir enfin propriétaire d'une maison qui, après ce délai, se sera peut-être transformée en ruine. Car, en ce domaine, « le bon marché coûte souvent cher ».
Mais le texte de Boutin cache une autre arnaque. Il prévoit en effet un assouplissement de la loi SRU (Solidarité et Renouvellement Urbain) qui obligeait les communes de plus de 3 500 habitants à disposer, à terme, de 20 % de logements sociaux sur leur territoire. Cette loi SRU, déjà peu contraignante pour les communes qui ne respectaient pas leur quota de logements sociaux, va l'être moins encore... Le gouvernement va intégrer dans les quotas de logements sociaux demandés aux communes la maison à 15 euros et d'autres logements accessibles à la propriété. En fait d'aide aux mal-logés, c'est plutôt d'aide aux majorités municipales, en particulier celles de droite, dont il faudrait parler...
Mais Boutin ne s'arrête pas en si bon chemin. Prenant prétexte du fait que des locataires continuent d'occuper des logements du parc HLM, alors que leurs revenus dépassent le plafond de ressources imposé pour y avoir droit, elle a décidé qu'ils devront le quitter dans un délai de trois ans, alors que jusqu'à présent, on leur demandait seulement de payer un surloyer. Cette mesure ne réglera rien : elle se traduira par des difficultés accrues pour ceux qui seront contraints à se loger au prix - prohibitif - du marché libre sans que cela réduise vraiment l'attente des demandeurs de logements sociaux. La nouvelle loi reviendra, au mieux, à expulser les uns pour en loger quelques autres, en laissant sur le carreau nombre de familles populaires.
Faire face à la crise du logement exigerait que l'État, avec les moyens considérables qui sont à sa disposition tant sur le plan financier qu'au niveau législatif, engage centralement - et pas en laissant cette responsabilité aux collectivités locales - un plan de construction massif à la hauteur des besoins et de l'urgence de la crise.
Boutin et les siens choisissent la direction diamétralement opposée. Leur projet ne vaut pas les 15 euros par jour des bicoques que Boutin essaie de nous fourguer.