- Accueil
- Lutte ouvrière n°2055
- Stress collectif à France Télécom
Dans les entreprises
Stress collectif à France Télécom
Les 13 et 14 décembre, quelque deux cents délégués du personnel de France Télécom, venus de toute la France, ont participé à des assises de l'Observatoire du stress et de la mobilité forcée, lancées en juin par Sud-PTT et un syndicat de cadres, CFE-CGC. Des militants CGT et FO étaient également présents à titre individuel.
Le personnel de France Télécom subit de lourdes pressions avec les fermetures de sites et les réorganisations permanentes devant aboutir à supprimer 22 000 emplois en France en trois ans, d'ici fin 2008. Il n'est donc pas surprenant que 66 % des travailleurs déclarent être " en situation de stress " et que 15 % se considèrent même en " détresse ". La direction aurait voulu nier l'existence de l'Observatoire du stress et de la mobilité forcée, alors que 3 234 travailleurs ont répondu à cette première enquête. Deux médecins du travail qui voulaient participer à la réunion de l'Observatoire se sont heurtés à une interdiction, avec menaces de licenciement, malgré l'intervention de l'inspection du travail. Mais les faits sont là : plus de trois travailleurs sur quatre interrogés lors d'une nouvelle enquête estiment leur santé affectée par leur travail.
Les informations ne circulent pas facilement, du fait des restructurations permanentes qui isolent encore plus les salariés. Certains des suicides qui ont eu lieu dans le nord de la France correspondent à des salariés " nomades " qui ne sont plus reliés à leur service que par téléphone, sans voir personne de la semaine. Se trouver seul face aux objectifs imposés par les directions peut devenir dangereux. Un des militants présents a été confronté à cinq cas de suicide parmi les collègues dont il est le délégué. D'autres salariés, sans en arriver là, souffrent durement des conditions de travail.
Les cadres ne sont pas épargnés, ils doivent souvent chercher eux-mêmes un emploi à l'intérieur de France Télécom après la réorganisation de leur service. Comme pour tout le personnel, le choix est souvent entre la démission et un nouvel emploi très loin du domicile. En Île-de-France, les déplacements prennent du temps et c'est souvent bien pire en province. Ainsi, des agents ont été transférés d'Alès à Nîmes (90 kilomètres aller-retour), d'autres de Vichy à Clermont-Ferrand (120 km ), d'autres encore de Saint-Gaudens à Toulouse (150 km). La liste est longue de sites déjà fermés ou menacés de fermeture.
Face à cette situation, les élus aux comités d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail - les CHS-CT - demandent de plus en plus à des cabinets spécialisés des expertises qui prennent en compte les risques de santé pour faire le travail ou pour s'y rendre. La direction paye des avocats pour tenter de faire arrêter par la justice le flot croissant de ces demandes d'enquête. Elle n'y est pas parvenue pour l'instant. Certes, les enquêtes n'annulent pas les mutations forcées, mais au travers de leurs conclusions, les travailleurs se sentent dans leur bon droit pour refuser des mesures prises, en réalité, dans l'intérêt des seuls actionnaires.