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- Lutte ouvrière n°2045
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Dans le monde
Allemagne : Le difficile combat des cheminots.
Après plus d'un mois et demi de négociations infructueuses sur les salaires, le syndicat des agents de conduite (GDL) avait appelé, le 5 octobre, à un débrayage entre 8 heures et 11 heures du matin. Mais une nouvelle fois un tribunal a, sur plainte de la direction de la Deutsche Bahn (DB), les chemins de fer allemands, foulé aux pieds le droit de grève, pourtant déjà bien restreint (les fonctionnaires en sont privés et les autres salariés ne peuvent recourir à la grève qu'au moment de la renégociation d'une convention collective, et seulement après avoir respecté toute une procédure de négociations).
Cet été, c'était le tribunal du travail de Nuremberg qui avait pris une décision similaire pour limiter la grève qui devait démarrer le 9 août. Le syndicat avait, en appel, obtenu gain de cause mais finalement accepté une " trêve ", d'abord jusqu'au 27 août, puis jusqu'au 30 septembre, pour reprendre les négociations. Mais la DB, dont les membres du conseil d'administration se sont octroyé une augmentation de rémunération de 62 % l'an passé, a continué de prétendre, de façon provocatrice, que les revendications de GDL allaient mettre l'entreprise sur la paille... alors que le groupe a enregistré en 2006, avec 2,1 milliards d'euros, le profit le plus élevé de son histoire !
Cette fois, c'est au tribunal du travail de Chemnitz que la direction s'est adressée, bien que cette ville ne corresponde ni au siège de la DB ni à celui du syndicat ! Sans doute pensait-elle que les juges y trancheraient plus facilement en sa faveur. Et c'est sous le prétexte ahurissant que ces trois heures... auraient occasionné un " dommage économique excessivement important " que la grève a été interdite pour le trafic de marchandises et sur les grandes lignes. En cas de non-respect de cette décision, le syndicat encourait une amende de 250 000 euros. Seuls les conducteurs des S-Bahn et des trains régionaux, soit l'équivalent des RER et TER français, ont été autorisés à débrayer.
Dans le cadre du renouvellement de la convention salariale des cheminots, les deux principaux syndicats de cheminots ont accepté, en juillet, un accord se traduisant par une hausse annuelle de 2,8 %. Seul le GDL a refusé de signer, qualifiant cette augmentation d'aumône. Il réclame que le salaire d'embauche des agents de conduite, qui est, sans les primes, d'environ 1 500 euros net, soit augmenté de 30 %.
Les agents de conduite ont bien des raisons d'entrer en lutte, ne serait-ce que parce que, selon les calculs du syndicat, leur pouvoir d'achat a reculé de 9,5 % par rapport à 1994. Ils ont contre eux une direction de combat qui a utilisé tout un arsenal anti-grève : menaces de licenciements sans préavis, annonces dans les journaux pour recruter des jaunes, appel à la police ferroviaire pour expulser les grévistes des emprises ferroviaires et les empêcher ainsi de s'adresser aux autres cheminots comme aux usagers, etc.), soutenue par un gouvernement qui a décidé de privatiser la DB en 2008.
Après la journée du vendredi 5, les dirigeants de GDL ont, une nouvelle fois, réclamé que la direction négocie. Celle-ci n'a bien sûr pas répondu et le syndicat annonce de nouvelles actions à partir du jeudi 11.