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- Lutte ouvrière n°2041
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Dans les entreprises
Continental - Clairoix (Oise) : La compétitivité tue
Suite au décès d'un chef d'équipe de 52 ans après un infarctus à l'usine Continental de Clairoix dans l'Oise, fin janvier 2007, la Sécurité sociale a estimé qu'il s'agissait d'un accident du travail " dû notamment au stress chronique ". Cette décision, rendue publique au début du mois de septembre, a été accueillie avec satisfaction par bien des ouvriers. Pour une fois a été reconnue la responsabilité du patron dans l'aggravation des conditions de travail, dans cette usine de pneus de près de 1 200 salariés.
Bien évidemment, la direction n'a, quant à elle, pas du tout apprécié la publicité faite autour de cette décision. Le directeur de l'usine de Clairoix a déclaré : " Il n'y a pas de pression particulière. Je ne pense pas qu'il y ait de stress, en dehors du stress classique dans la fonction d'encadrement. " Et d'ajouter : " Il y a un projet industriel, on a envie d'être plus performant, de rendre pérenne cette entreprise. On ne peut pas être immobile, sinon on est cuit. " Voilà qui ne manque pas de cynisme, l'expression " On est cuit " se rapportant évidemment aux actionnaires. Car peu importe à ce monsieur si la santé des salariés, celle des ouvriers à la production en particulier, en prend un coup.
Dans cette usine, le travail est en effet dur. Il faut tirer des chariots contenant des carcasses de pneus : beaucoup de travailleurs ont de graves problèmes de dos, des tendinites sérieuses aux bras, aux poignets. Il faut parfois débloquer des bourrages dans les machines qui sortent les bandes de caoutchouc nécessaires à la confection des pneus. Dans l'atelier des Mélanges, qui produit le noir de carbone, une matière noire et volatile qui donne sa coloration aux pneus et permet de les empêcher de " coller ", les travailleurs finissent leur poste avec cette poudre noire collée sur la peau. Elle ressort même après plusieurs douches. Les poumons l'emmagasinent, avec les conséquences que l'on imagine car elle contient aussi de la silice. Dès qu'il fait chaud à l'extérieur, la température à l'intérieur de l'usine devient insupportable.
Durant toutes ces dernières années, la direction a poussé à produire plus de pneus, plus vite. Et le patron voudrait encore aggraver les choses en faisant passer l'usine aux 40 heures.
Lorsqu'un travailleur épuisé s'arrête en maladie, il est convoqué et parfois licencié quand il s'agit d'un arrêt trop long au goût de la direction. Un licenciement suite à un accident du travail n'est pas rare. Dernièrement, un salarié qui avait travaillé neuf ans à l'usine a été licencié suite à un accident du travail survenu en octobre 2005. " La sécurité n'avait pas été respectée et on m'a déclaré inapte. Puis on m'a fichu dehors ", a déclaré à la presse ce salarié qui intente une action en justice pour licenciement abusif.
Mais, comme dirait le directeur de l'usine, cette exploitation permet aux actionnaires de ne pas " être cuits ". Bien au contraire même, puisque cette multinationale, quatrième producteur mondial de pneumatiques, se porte très bien. Lors d'une conférence de presse en février 2007, le président du directoire, Manfred Wennemer, s'était félicité de l'augmentation du bénéfice d'exploitation ainsi que de la progression de 100 % du dividende versé aux actionnaires.