LPC - Villers-Saint-Paul (Oise) : Après un accident grave, des travailleurs dénoncent le mépris pour la sécurité21/06/20072007Journal/medias/journalnumero/images/2007/06/une2029.jpg.445x577_q85_box-0%2C104%2C1383%2C1896_crop_detail.jpg

Dans les entreprises

LPC - Villers-Saint-Paul (Oise) : Après un accident grave, des travailleurs dénoncent le mépris pour la sécurité

Le 13 juin, un jeune ouvrier de 19 ans était retrouvé inanimé au fond d'une citerne à produits chimiques dans l'usine LPC de Villers-Saint-Paul. Il était réanimé après un arrêt cardiaque puis envoyé dans le coma à l'hôpital de Senlis, avec un important oedème cérébral.

Depuis des années, les grands groupes chimiques installés sur la plate-forme de Villers-Saint-Paul, Total (aujourd'hui avec sa filiale Crey Valley), Dupont de Nemours, ou le groupe DSM, installé à Compiègne, et d'autres encore, avaient confié au groupe de transport Géodis le soin de mettre sur pied une structure pour nettoyer au meilleur coût leurs citernes de transport de produits chimiques, pour certains hautement toxiques. Ce groupe a donc mis sur pied une filiale « indépendante » occupant actuellement dix-sept personnes. Mais la seule « indépendance » de cette entreprise est de s'exonérer du respect des règles de sécurité reconnues comme vitales dans ce domaine.

Dans les faits, les salariés assurant ce nettoyage avaient la responsabilité de monter seuls sur les citernes pour les ouvrir, sans savoir ce qu'elles contenaient. Ils devaient assurer, toujours seuls, le nettoyage, en montant le cas échéant des seaux de solvants, en ignorant totalement la toxicité des produits, avant d'en asperger manuellement l'intérieur de la citerne à l'aide d'une casserole. Puis, si ce n'était pas impeccable, il leur fallait descendre, toujours seuls et sans masque à oxygène, à l'intérieur de la citerne pour gratter le fond de celle-ci.

Les règles exigent la détection préalable, avant toute ouverture, le contrôle de la qualité de l'atmosphère à l'aide des appareils existants ; il est interdit aux salariés d'être seuls, même pour monter sur les citernes. En cas d'intervention dans celles-ci, il est prévu des scaphandres à oxygène avec un autre salarié en protection au dehors. Mais rien de tout cela n'existait.

Il a fallu que les deux ouvriers chargés de cette tâche, collègues de l'accidenté, se révoltent alors que l'un est lui aussi en CDD et que l'autre n'a que sept mois d'ancienneté. Tout en sachant les risques qu'ils pouvaient encourir, ils ont rendu public tout ce qu'ils savaient. Très vite il est apparu que les services de police, à qui l'enquête avait été confiée, refusaient d'entendre les salariés et ne voulaient prendre en compte que les déclarations des dirigeants de l'entreprise. Le groupe Géodis délégua immédiatement un de ses représentants. Des contre-vérités furent répandues dans la presse. Mais finalement, même si la télévision régionale privilégia les déclarations patronales, toute la presse écrite prit le parti des salariés.

Dans un premier temps, les services de l'inspection du travail n'avaient « pas eu le temps d'entendre les salariés ». Mais, le lundi 18 juin, les choses ont commencé à bouger. Accompagnés d'un représentant du Syndicat Démocratique Chausson auquel ils s'étaient adressés, et en présence d'un représentant central CFDT du groupe, les deux salariés, après une dernière opposition vive du DRH de Géodis, ont pu faire enregistrer leur « droit de retrait pour cause de danger imminent ». Ils réclamaient la mise de l'installation aux normes de sécurité de l'industrie chimique. La direction générale, qui n'avait pas encore osé remettre en route les installations, a commencé dès le lendemain à promettre des études et à faire des propositions partielles. Enfin, après le préfet, l'inspection du travail a promis une intervention dans le sens de la protection des salariés.

Ce qui a surpris tout le monde, les représentants du patron en premier, c'est que des salariés se défendent : « Pourquoi êtes-vous restés dans l'entreprise si vous aviez vu ce qui n'allait pas ? », a déclaré spontanément le DRH. Ces gens-là oublient tout simplement que leurs ouvriers viennent travailler pour gagner leur vie, pas pour la perdre.

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