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Belgique : Les Partis Socialistes sont les grands perdants des élections législatives
Les électeurs belges, eux aussi, ont voté dimanche 10 juin pour élire leurs représentants dans les Chambres et au Sénat.
Les deux Partis Socialistes (l'un flamand, l'autre wallon) sont ceux qui ont le plus perdu : - 30 % en Flandre et -15 % en Wallonie.
En Wallonie, ce recul est en partie dû au discrédit des dirigeants socialistes du Hainaut, et de Charleroi en particulier, compromis dans des détournements de fonds et des magouilles municipales dont la presse s'est largement fait écho, alors que les sommes en jeu sont infiniment moins élevées que les cadeaux faits aux riches fraudeurs du fisc qui ont pu rapatrier leurs capitaux lors des dernières amnisties fiscales.
Ces explications servent de feuille de vigne au président du PS Élio Di Rupo, mais elles ne peuvent cacher les causes profondes du discrédit de la famille socialiste, de part et d'autre de la frontière linguistique : la participation des socialistes aux gouvernements et leur alignement sur les exigences du patronat, notamment les reculs des salaires, l'effondrement des pensions depuis trente ans, la diminution des remboursements de santé, la chasse aux chômeurs, la volonté de faire travailler les plus de 50 ans alors que les jeunes sont au chômage
Alors, une partie des électeurs socialistes se sont reportés sur les listes des écologistes, dont le fiasco de leur participation gouvernementale entre 1999 et 2003 commence à être oublié. Ils sont remontés à près de 10 % en Wallonie.
Mais c'est surtout le Mouvement Réformateur (libéral) qui apparaît le grand vainqueur car il dépasse le PS pour la première fois. Et le CDH (Centre Démocrate Humaniste), l'ancien Parti Social-Chrétien, progresse aussi. Mais contrairement aux craintes suscitées par les sondages, l'extrême droite est restée stable autour de 5 % en Wallonie.
En Flandre, les libéraux perdent 22 %, ce qui fait que les sociaux-chrétiens retrouvent le leadership qu'ils avaient perdu en 1999. Mais le Parti Socialiste a aussi perdu 30 %, bien plus qu'en Wallonie, sans que ses dirigeants puissent invoquer des scandales de corruption pour rejeter la faute sur quelques éléments pourris. C'est bien la politique du PS qui est sanctionnée.
Mais, pour la seconde élection successive, ce n'est pas le Vlaams Belang (ex-Vlaams Blok) nationaliste flamand d'extrême droite qui bénéficie du discrédit du PS. Le VB est resté quasiment au même niveau qu'aux élections de 2006 et 2004.
Par contre une nouvelle formation populiste de droite, anti-wallonne et séparatiste, dirigée par un ancien champion de judo, qui prône un rapprochement de la droite avec le VB, Dedecker, a recueilli plus de 268 000 voix, soit 6,6 % des électeurs de Flandre.
Comme le Parti Libéral et le Parti Social-Chrétien flamands avaient eux aussi mené campagne sur le thème démagogique du " boulet wallon " qui pèserait sur l'économie flamande, ces idées fausses continuent à se développer. D'autant plus que les leaders wallons justifient eux aussi les difficultés économiques en Wallonie par les blocages imposés par la Flandre.
Alors, la Belgique évolue-t-elle à droite, comme l'annonce la presse française ? Sans doute, si l'on considère les Partis Socialistes comme " de gauche ". Mais cette notion ne veut plus dire grand-chose pour des partis interchangeables au gouvernement. Le prochain pourrait voir une alliance des sociaux-chrétiens et des libéraux comme dans les années 1980, les socialistes se refaisant une virginité dans l'opposition. Ce qui est manifeste, c'est que la scission de ce qui reste de commun à l'ensemble du pays, notamment la Sécurité sociale, pourrait bien être à l'ordre du jour, ce qui accentuerait encore la division et la concurrence entre les travailleurs des deux parties du pays.
Cette évolution se fait en tout cas aux dépens de la conscience ouvrière, même si cette année la présence de listes du Parti Communiste lui a permis de recueillir près de 20 000 voix, et si le total de l'extrême gauche, PC compris, augmente légèrement et atteint maintenant 1,4 %.
Claude THIÉRAM
Contrairement à la France, les élections en Belgique sont à la proportionnelle intégrale, avec cependant un minimum de 5 % pour avoir des élus. Et le vote y est obligatoire. Mais la structure de l'État belge est nettement plus complexe, avec trois régions et deux communautés linguistiques ayant chacune leur Chambre de représentants.
Trois familles politiques se partagent le pouvoir politique depuis plus d'un demi-siècle : les socialistes, lointains héritiers d'une Seconde Internationale très réformiste ; les sociaux-chrétiens, famille la plus puissante pendant presque tout le 20e siècle ; et les libéraux, anciennement le parti de la grande bourgeoisie anticléricale. Ces trois familles politiques sont divisées en deux branches, l'une francophone, l'autre flamande.
Le scrutin à la proportionnelle, l'abandon de la défense des valeurs sociales par les Partis Socialistes, la laïcisation des sociaux-chrétiens et l'abandon de l'anticléricalisme par les libéraux, font que ces partis gouvernent ensemble le pays depuis des dizaines d'années, soit avec des alliances à deux familles, soit même les trois ensemble. En réalité, au-delà de la concurrence entre leurs leaders, leur politique est quasiment la même au service des intérêts de la bourgeoisie.
Les Partis Socialistes ont cependant conservé un électorat ouvrier, surtout dans le Hainaut et le bassin sidérurgique liégeois.