L'usine Alcan d'Issoire, près de Clermont-Ferrand, fêtait son 60e anniversaire samedi 9 juin mais, pour les salariés, ce n'est pas vraiment la fête...

Cette usine de production d'aluminium, qui s'appelait Cégédur-Péchiney jusqu'en 2003 (groupe Rhénalu), emploie 1 500 salariés auxquels s'ajoutent un millier de personnes habilitées à travailler dans l'entreprise et 150 intérimaires en moyenne.

La plus grande partie de la production est destinée à l'aéronautique. Comme ce marché est momentanément " juteux ", la direction a l'intention de fermer l'atelier de tôles moyennes non trempées, ce qui entraînerait la suppression de 100 postes.

Cette décision est d'autant plus aberrante que les commandes affluent aussi dans ce secteur soi-disant moins " rentable ", et que les cadences ne faiblissent pas. Mais non, il faut " faire de la place à l'aéronautique ", sans s'occuper des autres besoins, et donc baisser la production de 23 000 à 6 000 tonnes sur trois ans, avec les suppressions de postes à la clef. " On pompe le maximum de fric sur l'existant et, selon les cas, on stocke ou on ferme des ateliers. Alcan garde le plus juteux dans l'immédiat ", résumait une syndicaliste CGT de l'usine.

Et de plus, début mai, l'annonce a été faite d'une OPA hostile de l'américain Alcoa (numéro 2 de l'aluminium) sur Alcan, qui a surpris tous les travailleurs du site. Ce même jour, le 7 mai, l'action a grimpé de 32 % !

Alcan a réalisé en 2006 un bénéfice de 2 milliards d'euros, ce qui représente quatorze fois plus que l'année précédente. Les commandes ne manquent pas, dont un contrat avec Airbus sur cinq ans.

Vu la situation chez Airbus où, malgré beaucoup de travail, des milliers de licenciements sont annoncés, les salariés d'Alcan sont très inquiets, de l'ouvrier à l'ingénieur, en passant par les techniciens. Mais le PDG d'Alcan, lui, a pris les devants : quelques jours avant l'annonce de l'OPA, il s'est fait voter un parachute doré de 13 millions de dollars et va se faire embaucher chez le racheteur.

Non seulement les salariés, mais toute la population d'Issoire, petite ville de 14 000 habitants, s'inquiète pour l'avenir. Les habitants se sont déjà mobilisés à plusieurs reprises contre un projet de restructuration de l'hôpital, qui prévoyait des suppressions de lits et d'effectifs. Ce projet vient d'être abandonné grâce à la lutte des personnels hospitaliers.

Actuellement chez Alcan, après les assemblées générales et la pétition de l'intersyndicale, on discute beaucoup. Une conférence de presse des syndicats a été organisée. Samedi 9 juin, la CGT diffusait un tract d'information lors de la journée " portes ouvertes " de la direction.

Les travailleurs ont raison d'être méfiants, car les capitalistes se moquent bien des conséquences de leurs opérations boursières sur le sort des salariés et de la population. Pour augmenter leurs profits, ils sont prêts à tout, y compris à ruiner des régions entières.