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Leur société
Suppression de la carte scolaire ? Faux débats et effets d'annonce
En pleine campagne des législatives, le nouveau ministre de l'Éducation nationale, Xavier Darcos, a "communiqué" sur la suppression de la carte scolaire, un des axes de Nicolas Sarkozy dans les mois qui ont précédé son élection.
Dans un discours tenu devant le congrès de la Fédération des conseils de parents d'élèves (FCPE), le ministre a annoncé son intention de " supprimer progressivement la contrainte qui pèse sur les familles ", en demandant néanmoins aux chefs d'établissements, collèges et lycées, de " veiller à une plus grande diversité sociale et géographique de leur recrutement ". Il a argué que cette règle, obligeant les familles à inscrire leurs enfants en fonction de leur lieu d'habitation, a été mise au point en 1963, qu'elle serait dépassée et que " l'important " serait " d'obtenir plus de mixité sociale par d'autres moyens ".
Cet argument de la " mixité sociale " laisse pantois. Comment supposer que les enfants de la bourgeoisie et ceux de la population pauvre pourraient se retrouver dans les mêmes classes des mêmes écoles ou collèges, alors que les quartiers qui hébergent les uns et les autres sont la plupart du temps différents ? L'existence d'établissements ghettos n'est-elle pas le résultat automatique de celle de quartiers concentrant les plus pauvres ? La " mixité sociale " que Darcos prétend préserver est une chimère destinée à laisser croire que le gouvernement se soucierait de justice, d'égalité des chances pour tous, que l'on soit né aux Minguettes dans la banlieue lyonnaise, aux Bosquets de Montfermeil, à Neuilly ou à Passy.
Pendant sa campagne, Sarkozy avait beau jeu de stigmatiser la " fatalité " que représente la carte scolaire " pour ceux qui n'ont pas les moyens ou les relations pour s'en affranchir ". En effet, des parents utilisent des détours pour inscrire leur enfant dans un collège dont la réputation et les résultats sont meilleurs même si leur lieu d'habitation en principe ne leur donne pas ce droit. Pour cela, ils peuvent choisir une première langue enseignée seulement là ou bien louer une chambre ou même simplement un compteur d'électricité dans le secteur de l'établissement convoité. L'état de l'enseignement étant ce qu'il est, on peut d'ailleurs comprendre une famille qui pense permettre ainsi à son enfant d'étudier dans de bonnes conditions. Mais l'argument de l'égalité des chances est particulièrement cynique, venant de ceux qui n'ont pour but que de favoriser la fraction la plus riche de la population. D'autant que leur programme consiste à continuer et même à accélérer les coupes budgétaires dans le budget de l'Éducation nationale, au détriment de tous les élèves, mais encore bien plus de ceux pour qui l'école est souvent une épreuve supplémentaire, voire un facteur d'échec.
L'existence d'une carte scolaire n'a qu'un lointain rapport avec une véritable égalité des chances des élèves des quartiers pauvres et des quartiers bourgeois. Mais l'annonce de son assouplissement, même progressif, n'est qu'un signal destiné à marquer l'entrée en fonctions d'un nouveau ministre dévoué, comme ses collègues du nouveau gouvernement Fillon, aux intérêts des plus riches.