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Allemagne : Les travailleurs de Deutsche Telekom en lutte contre la baisse des salaires
La grève engagée en Allemagne le 11 mai par une partie des salariés de Deutsche Telekom se poursuivait toujours le 30 mai. C'est la première lutte importante qui touche l'ancienne entreprise d'État - qui emploie 180 000 salariés aujourd'hui, contre 280 000 au moment de sa privatisation en 1995.
Au nom de la réduction des coûts, la direction veut transférer, d'ici le 1er juillet, 50 000 salariés des secteurs de services (centres d'appel, services techniques, etc.) dans de nouvelles filiales. Les travailleurs concernés verraient leurs salaires baisser de 9 % et leur temps de travail augmenter de 34 à 38 heures. En prenant en compte l'ensemble des mesures, cela représenterait, selon le syndicat ver.di, une baisse allant jusqu'à 40 % pour les nouveaux embauchés.
Pour justifier cela, Deutsche Telekom met en avant une baisse du bénéfice net - qui s'est tout de même élevé à 3,16 milliards d'euros - de 43 % en 2006. Or cette baisse s'explique principalement par les provisions réalisées pour les 32 000 suppressions de postes engagées depuis l'an passé. En outre, ce recul n'a pas empêché de verser aux actionnaires un dividende inchangé. Il s'agit donc d'une provocation ouverte à l'égard des salariés, qui a lieu avec la complicité de l'État, encore actionnaire à hauteur de 32 %, et dont les deux représentants au Conseil de surveillance, tous deux membres du Parti Social-Démocrate, ont voté pour l'externalisation.
Après des semaines de débrayages et de négociations infructueuses pour obtenir un " accord social " garantissant au moins le maintien du salaire, le syndicat ver.di a finalement organisé un vote. Plus de 22 000 syndiqués y ont pris part, soit environ 93 % des salariés concernés (ceux qui ont le statut de fonctionnaires n'ont pas le droit de grève et n'ont donc pas participé au vote). 96,5 % des votants se sont prononcés pour une grève illimitée.
Dès le départ, la direction de Deutsche Telekom a cherché à briser la grève : menaces de licenciement contre les apprentis s'ils participent au mouvement (ce qui est pourtant légal), octroi d'une prime de 300 à 500 euros aux non-grévistes, tentative d'utiliser les fonctionnaires comme briseurs de grève, recours à des intérimaires pour remplacer des grévistes - ce qui est pourtant exclu par la convention collective en vigueur -, contrôle des téléphones mobiles de service des travailleurs pour savoir comment la grève est organisée... Elle a aussi envoyé à des centaines de salariés des lettres d'assignation pour " service d'urgence ". Il ne s'agit pas de maintenir les communications des hôpitaux ou des pompiers, ce que les grévistes sont prêts à faire, mais d'assurer le succès du sommet du G8 prévu du 6 au 8 juin à Heiligendamm, dans le nord de l'Allemagne.
La grève bénéficie de la sympathie de nombreux travailleurs, y compris dans le secteur privé. Et on n'entend pas cette fois les réflexions habituelles contre les fonctionnaires ou assimilés. Car beaucoup sont conscients qu'une victoire de la direction de Deutsche Telekom ouvrirait une brève supplémentaire et serait un encouragement à l'ensemble du patronat à accentuer son offensive pour baisser le coût du travail. Alors, une victoire des travailleurs de Deutsche Telekom serait une victoire pour tous.