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Allemagne : Un "compromis pourri" dans la métallurgie
Alors que la période de " paix sociale ", liée à la précédente convention salariale, était arrivée à expiration le 28 avril, la fédération syndicale allemande de la métallurgie IG Metall et l'organisation patronale Gesamtmetall sont parvenues, le 4 mai, à un compromis.
Cet accord, qui couvrira la période d'avril 2007 à octobre 2008 et devrait s'appliquer à l'ensemble des 3,4 millions de salariés des industries métallurgiques et électriques du pays, prévoit une augmentation salariale de 4,1 % en juin prochain, puis de 1,7 % en juin 2008. À cela s'ajoute une prime de 400 euros pour les mois d'avril et de mai 2007, ainsi que le versement d'un autre supplément à partir de juin 2008.
La presse, allemande comme française, a présenté ce résultat comme " la plus importante hausse depuis 1992 ". L'IG Metall parle, de son côté, d'une augmentation salariale de 5,8 % sur la durée de l'accord. C'est une façon tendancieuse de présenter les faits. En réalité, sur une base annuelle, l'augmentation s'élève à environ 3,3 %. En outre les employeurs ont la possibilité de repousser la seconde augmentation de 4 mois. Ce qui dans ce cas fera en fait une hausse annuelle de 2,5 %... soit ce que proposait le patronat au départ !
L'augmentation obtenue est donc loin de permettre un rattrapage réel du pouvoir d'achat ni de faire face l'augmentation de trois points du taux de TVA, intervenue en janvier dernier. Et puis bien des métallos n'en verront que très peu la couleur. Dans le cadre de l'introduction, depuis deux ans, d'une nouvelle grille salariale baptisée ERA, leur classification et leur salaire ont été revus à la baisse. Des primes compensatoires sont prévues pour ceux qui sont déclassés. Mais elles sont alimentées par des prélèvements sur les augmentations de salaire... qui sont réduites d'autant.
Au début, l'IG Metall réclamait 6,5 % d'augmentation. C'était déjà un chiffre en retrait par rapport aux revendications adoptées par bien des sections syndicales d'entreprise : entre 8 et 9 %. Ces exigences étaient loin d'être irréalistes lorsqu'on sait que, par exemple, les entreprises de la métallurgie cotées en Bourse ont augmenté leurs profits de 30 % l'an dernier. Mais la direction du syndicat avait alors expliqué qu'il ne fallait pas demander trop car la population, et en particulier les chômeurs, ne " comprendraient " pas !
Alors le patronat ne peut que se réjouir de l'accord obtenu : il vient de prendre, au moindre coût, une assurance sur la paix sociale pour les dix-neuf mois venir (si toutefois les travailleurs acceptent de s'en tenir là pendant toute cette période). Et puis cela n'empêchera nullement le patronat, comme il l'a déjà fait dans un certain nombre d'entreprises, de tenter d'imposer des baisses de salaire (par exemple, en supprimant ou diminuant les primes de fin d'année) en exerçant un chantage à l'emploi.
Après avoir mobilisé, entre le 28 avril et le 3 mai, plusieurs centaines de milliers de salariés dans le cadre de débrayages d'avertissement, les dirigeants de l'IG Metall ne souhaitaient surtout pas les engager dans une véritable épreuve de force. Ils ne voulaient en effet pas gêner le patronat à une période où les carnets de commande sont pleins et où de nombreuses entreprises n'arrivent pas à fournir dans les délais. Pour tout ouvrier, c'est pourtant le type de circonstances favorables pour exiger son dû...