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- Lutte ouvrière n°2011
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Italie - le transfert du TFR aux fonds de pension : Un pas de plus vers la privatisation des retraites
En Italie comme dans le reste de l'Europe, de grandes manoeuvres sont en cours autour des retraites des travailleurs. Elles visent en particulier le TFR, le «traitement de fin de rapport», une indemnité appelée aussi «liquidation», que les patrons sont tenus de verser à leurs employés en cas de départ. Représentant un peu moins d'un mois de salaire par année de présence dans l'entreprise, il vient suppléer l'absence presque totale d'assurance chômage ou compléter la retraite. Depuis longtemps, les fonds de pension privés voulaient mettre la main sur les sommes que les patrons sont tenus de mettre de côté pour payer les TFR, et par ce biais s'introduire dans le système des retraites.Le gouvernement Prodi vient de leur donner satisfaction, comme le dénonce l'article suivant, sur «l'arnaque du TFR», extrait du journal L'Internazionale de nos camarades italiens.
Alors qu'une mesure analogue se prépare pour le secteur public, la confiscation du TFR est déjà une réalité pour tout le secteur privé. Avec un an d'avance sur la réforme mise en place il y a un an par le gouvernement Berlusconi, le gouvernement Prodi a fait un nouveau pas vers l'abandon définitif des retraites aux hasards des fluctuations des marchés financiers.
Le mécanisme dit de «l'accord tacite» pour le transfert du TFR aux fonds de pension a démarré le 1erjanvier; d'ici au 30juin 2007, les travailleurs qui n'auront pas déclaré expressément et par écrit qu'ils veulent que leur TFR demeure géré au niveau de l'entreprise, verront celui-ci transféré directement aux fonds de pension privés. Il pourra s'agir de fonds par catégorie professionnelle, dits «fermés», comme le fonds Cometa des travailleurs de la métallurgie (à la gestion duquel participent les syndicats - NdT), ou bien de fonds dits «ouverts» auxquels peuvent accéder indistinctement tous les travailleurs; ou bien il pourra s'agir de polices individuelles de retraite, souscrites par le travailleur à titre personnel.
Quoi qu'il en soit, alors que, s'il reste au niveau de l'entreprise le rendement du TFR sera comme par le passé garanti par la loi, avec chaque année une valorisation de 1,5% augmentée de 0,75% de l'inflation, aucune garantie n'est prévue si sa gestion passe aux fonds de pension privés. En réalité il ne sera plus qu'un simple investissement, n'offrant aux travailleurs aucune sécurité quant au rendement mais même quant au maintien du capital. Aucun fonds ne peut garantir à son souscripteur que d'ici vingt ou trenteans il retrouvera son capital accru, ou même simplement intact: il suffit de rappeler la faillite d'Enron aux États-Unis. Les travailleurs d'Enron, outre le fait d'avoir été licenciés en masse, restèrent aussi sans aucune garantie du fait du système de retraite entièrement basé sur les fonds de pension. (...)
Un autre détail non négligeable est la non-révocabilité de la décision: si le TFR est confié aux fonds de pension, c'est pour toujours; tout au plus pourra-t-on changer de fonds. On imagine déjà l'apparition sur le marché d'une quantité de «produits» en concurrence entre eux, qui tenteront d'allécher le travailleur avec des spéculations en tout genre, assurant à toutes les compagnies une belle tranche du gâteau.
Cet épilogue est annoncé depuis au moins douzeans, depuis que la réforme du système des retraites du gouvernement Dini (approuvée par les syndicats - NdT) a rendu en fait impossible de maintenir un niveau de vie correct avec le rendement misérable des retraites de la Sécurité sociale. C'est le cas surtout pour les générations entrées dans le monde du travail à partir de 1993. Leurs pensions, calculées sur la base des règles présentes, n'atteindront même pas 50% des salaires actuels. Ainsi il est facile de présenter le passage du TFR aux fonds privés comme le «deuxième volet» privé qui viendra soutenir l'insuffisante retraite publique, et comme son complément naturel. (...)
Extrait de l'Internazionale - février 2007