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Dans les entreprises
Arcelor–Mittal : Laissez-moi polluer gratis
Mi-décembre, la direction du nouvel ensemble Arcelor Mittal avait laissé entendre que les derniers hauts-fourneaux de Lorraine, dont la fin avait été programmée par Arcelor pour 2010, pourraient finalement continuer jusqu'en 2014, en raison des demandes importantes d'acier. Mais, début janvier, le directeur général d'Arcelor Mittal France, Daniel Soury-Lavergne, annonçait qu'ils pourraient finalement être fermés dès 2008, avec à la clef plus d'un millier de suppressions d'emplois, sans parler des sous-traitants, en raison de la diminution des quotas de gaz carbonique (CO2) accordés à la sidérurgie.
Gros émetteurs de CO2, les usines sidérurgiques situées en France n'auraient plus droit de rejeter dans l'atmosphère que 24,9millions de tonnes en 2007, alors que leurs patrons tablaient sur 28millions de tonnes. Responsable des trois quarts de ces émissions, le groupe Arcelor Mittal souhaite obtenir le droit de rejeter gratuitement 4 à 5millions de tonnes de CO2 en plus dans l'atmosphère. Sinon? «Nous risquons la catastrophe sociale», menace le directeur général d'Arcelor Mittal, qui évoque non seulement la fermeture anticipée des hauts-fourneaux lorrains mais aussi la remise en cause des projets à Fos-sur-Mer et à Dunkerque.
Depuis 2005, les différents pays de l'Union européenne ont accordé à leurs industries des droits d'émission de gaz à effet de serre. Chaque pays a bien sûr bichonné ses propres industriels en leur attribuant des droits d'émission supérieurs à leur activité réelle. Ainsi le gouvernement français avait estimé que les entreprises de l'hexagone rejetteraient 150millions de tonnes de CO2 en 2005, mais elles n'en ont finalement rejeté «que» 131 millions. Ce qui n'empêchait pas d'ailleurs le Medef de réclamer 163 millions de tonnes pour l'année suivante...
Les entreprises qui n'utilisent pas tous leurs droits peuvent les vendre. Comme le souligne la CGT de Sollac à Florange, Arcelor se garde bien de rappeler qu'il a vendu pour 28 millions d'euros de droits à polluer en 2005, sur le «marché international des droits d'émission». Dans ce monde fou, tout se vend, tout s'achète et tout est matière à spéculation, y compris le droit de polluer l'atmosphère! C'est ainsi qu'Arcelor pouvait très bien racheter des droits à CO2 s'il lui en manque, à défaut, évidemment, d'investir pour que ses installations polluent moins, ce qui serait tout à fait possible. Mais Arcelor ne veut rien payer, d'où ce petit chantage crapuleux à l'emploi qui n'est pas vraiment une nouveauté dans la sidérurgie.