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Dans les entreprises
Arc International (Pas-de-Calais) Mille travailleurs débrayent : Les temps changent!
Jeudi 23 novembre, il s'est passé quelque chose d'inédit dans les usines de la famille Durand, qui dirige Arc International, autrement dit les cristalleries d'Arques. À l'appel des organisations syndicales CGT, CFDT, FO et CFTC, environ mille salariés se sont rassemblés devant les bureaux de la direction pour exiger un 13e mois.
Depuis 2000, les salaires sont bloqués avec zéro augmentation, les primes d'intéressement et de participation aux bénéfices fondent comme neige au soleil. La direction a prétexté la mise en place de la RTT pour bloquer les salaires. Et puis, à partir de 2005, elle a organisé une vaste restructuration avec près de 2700 suppressions d'emplois. Dans les années 1990, il y avait plus de 11000 salariés, l'effectif est passé aujourd'hui en dessous des 8400. La direction s'appuie sur la crainte de perdre son emploi pour faire accepter une diminution importante des revenus.
Mais fin octobre elle a poussé trop loin le bouchon. D'abord, elle a accordé une augmentation de 2%, jugée très insuffisante par les salariés, puis elle a déclaré que la prime d'intéressement était en chute libre, passant de 7,17% en juin à 3,17% fin septembre. Dans ces conditions, les acomptes déjà versés seraient supérieurs au montant réel de la prime et la direction serait amenée à se faire rembourser le trop-perçu. Cette annonce a suscité un mécontentement très vif; des rumeurs de débrayages et de grève circulaient sur les fours et en bout de ligne de production. Les syndicats ont donc reposé la revendication du 13e mois garanti, en remplacement de cette prime d'intéressement très aléatoire.
La direction s'est vite rendue compte du climat de contestation régnant dans l'usine. Elle a annoncé qu'une prime exceptionnelle de 250 euros serait versée le 11 décembre et qu'elle renonçait à tout remboursement du trop-perçu. Dans le même temps, elle engageait des négociations avec les syndicats et proposait un semblant de 13e mois à 1283 euros brut unique pour tous, sauf les cadres qui n'étaient pas concernés.
Les syndicats CGT, CFDT, FO et CFTC semblaient prêts à signer un accord mais, dans les ateliers, le personnel de production posté refusait ce 13e mois au rabais à 1000 euros net et parlait de revendiquer 1500 euros net. Les syndicats, sous la pression des salariés, n'ont donc pas signé et ont demandé à la direction 1 500 euros brut. Enfin ils ont appelé à un rassemblement au moment des nouvelles négociations. De son côté le syndicat autonome, aux ordres de Durand, disait partout qu'il ne fallait pas faire grève car cela mettrait l'emploi en péril!
C'est ainsi que près de mille personnes venant de tous les secteurs de l'usine se sont rassemblées devant les bureaux de la direction: à sa grande surprise, les salariés d'Arc International avaient osé défier la famille Durand! Mais il fallut encore trois heures de tractations pour que la direction finisse par céder 1 500 euros brut.
Les salariés présents ont accepté la proposition et sont retournés dans les ateliers. C'est la première fois que les travailleurs d'Arc International font reculer la direction. Ils ont le sentiment de lui avoir donné une gifle et elle se plaint, dans la presse, d'avoir négocié sous la contrainte... Personne ne va pleurer: il est à souhaiter, au contraire, que les travailleurs d'Arc International prennent l'habitude d'utiliser la «contrainte» contre le patron pour faire avancer leurs revendications!