- Accueil
- Lutte ouvrière n°1989
- PME : Des aides qui profitent aux grandes entreprises
Leur société
PME : Des aides qui profitent aux grandes entreprises
Jeudi 7 septembre, Renaud Dutreil, le ministre des Petites et Moyennes Entreprises (PME), du Commerce, de l'Artisanat et des Professions libérales, annonçait une série de mesures destinées aux PME. Il s'agit, on s'en doute, de divers cadeaux fiscaux. Ainsi le projet de loi de finances pour 2007 prévoit le gel de l'impôt sur les sociétés ou encore le décalage du paiement des cotisations des salariés nouvellement embauchés. Pour les très petites entreprises, (TPE), celles de moins de 20 salariés, il est question d'une exonération totale des cotisations sociales patronales au niveau du smic. Le coût de tels cadeaux se chiffre par centaines de millions d'euros.
Pour justifier ces dépenses, Renaud Dutreil prétend, comme bien d'autres ministres l'ont fait avant lui, que ces cadeaux n'iraient pas aux "gros" mais aux "petits". Mais qui se cache derrière ces "petites" entreprises?
D'après le numéro des Cahiers français consacré aux "nouvelles logiques de l'entreprise", 42% de l'ensemble des salariés des PME sont en fait contrôlés par un groupe plus important. Cette proportion qui était de moins de 15% en 1984 et de 21% en 1990 atteint aujourd'hui 73% dans les PME de 200 à 499 salariés. Autrement dit, derrière une très grande partie des PME, se cachent des grands groupes. Chaque avantage accordé à des PME permet aux grandes sociétés d'augmenter leur marge bénéficiaire, directement ou indirectement.
Pour justifier les différentes aides et exonérations fiscales, ce gouvernement, comme tous les gouvernements depuis des années, prétend que ces PME sont créatrices d'emplois: les aider servirait donc à faire baisser le chômage. Le ministre Dutreil, évidemment peu objectif en la matière, déclarait dans sa conférence de presse de rentrée que: "Au coeur de la bataille pour l'emploi les PME contribuent fortement à la baisse du chômage; c'est ainsi que 150000 emplois salariés supplémentaires ont été créés depuis un an, selon l'Unedic". Mais il semble que même l'Insee ne montre pas autant d'enthousiasme. Comme le montrait Frédéric Boccara, chercheur à l'Insee, dans des travaux datant de 1998: "Une partie de l'accroissement de l'emploi situé dans les PME résultait au moins autant et même plus des suppressions d'emplois qui entraînent la diminution de la taille des grandes entreprises, devenant alors des PME que de la croissance des très petites."
Effectivement, bien des travailleurs peuvent témoigner que depuis des années les grandes entreprises licencient pour faire des économies sur les "coûts de production", comme disent les patrons, et externalisent un nombre croissant d'activités, telles que le Nettoyage ou la Maintenance, en les confiant à des entreprises sous-traitantes.
Par exemple, l'usine Citroën d'Aulnay, qui appartient au groupe PCA, a pu faire appel à l'entreprise ENCI, pour le nettoyage, à Gefco pour le travail de caristes, à la société Trigo pour le contrôle des pièces livrées par les fournisseurs. Trigo est une société créée en 1997 par un cadre de chez Peugeot pour faire un travail assuré auparavant par des ouvriers de Peugeot, depuis moins bien rémunérés. Renault a également fait appel à des sous-traitants. À l'usine de Flins, le tri et le conditionnement des déchets de cartons ainsi que la préparation de certains câblages ont été confiés à Renosol, la livraison des sièges à JohnsonControl, l'assemblage des panneaux de porte, des boucliers et des tableaux de bord à Visteon.
Cette externalisation de certains secteurs se traduit, dans le meilleur des cas, par un maintien de l'emploi, mais le plus souvent, par une diminution du nombre d'ouvriers affectés à ces tâches.
Voilà qui démonte le baratin que nous sert Dutreil. Ceux qui au bout du compte profitent le plus de toutes ces mesures ne sont pas les chômeurs qui créent une petite entreprise dont la durée de vie est souvent très brève, mais bien, au bout de la chaîne, les plus grands groupes.