- Accueil
- Lutte ouvrière n°1989
- Faux médicaments et vrais profits de l'industrie pharmaceutique
Leur société
Faux médicaments et vrais profits de l'industrie pharmaceutique
La production de faux médicaments progresse dans le monde. Selon des chiffres de 2003, 70% des antipaludéens utilisés au Cameroun et dans six autres pays africains étaient contrefaits, de même que 10 à 12% des médicaments vendus en Russie. En 2003 toujours, 64% des médicaments contre la malaria utilisés au Vietnam ne contenaient pas de principe actif.
Ces médicaments font des centaines de milliers de victimes dans les pays pauvres, en Asie du Sud-Est, en Afrique, en Amérique latine et maintenant en Europe de l'Est. Pour la seule Chine, ils auraient fait en 2001, selon la revue médicale anglaise The Lancet, 192000 morts.
Cette contrefaçon est devenue une véritable industrie. Il est loin le temps de la production artisanale de "remèdes" de charlatan. Les médicaments contrefaits sont vendus sous le même emballage et avec la notice des médicaments d'origine. Mais sous cet emballage, ce sont souvent des médicaments périmés de pays riches. Pire encore, le principe actif peut être remplacé par des substances nocives. Et s'il y a quand même un principe actif dans le médicament, il peut être à dose trop faible, ce qui peut entraîner, par exemple pour un antibiotique, le développement de résistances chez les bactéries.
L'Inde et la Chine, les deux principaux pays producteurs de faux médicaments, sont montrées du doigt. Mais c'est oublier le fait que, dans les pays pauvres, les médicaments sont inabordables, bien trop chers pour des familles dont ils peuvent représenter de 50 à 90% des dépenses. Si cette industrie de la contrefaçon existe et se développe, c'est d'abord parce que la misère, le coût prohibitif des vrais médicaments dans les pays pauvres, quand ce n'est pas leur absence sur ces marchés, rendent tous ces trafics possibles. Et ce n'est pas le laxisme supposé des autorités indiennes ou chinoises qui est seul en cause, mais l'attitude des grands trusts de l'industrie pharmaceutique mondiale, dont la politique de recherche du profit maximal interdit l'accès à des médicaments efficaces, mais chers, aux pays du Tiers Monde et aux pauvres des pays riches.
Cette industrie ne travaille que pour le profit et donc pour les populations considérées comme solvables. Elle peut dépenser des milliards pour mettre au point des médicaments contre l'obésité mais presque rien et en tout cas pas assez pour mettre au point des médicaments pour les maladies qui frappent les pays pauvres. Le Courrier de l'Unesco relevait que "sur 1233 médicaments de synthèse mis sur le marché entre 1975 et 1997, 11 seulement étaient destinés à lutter contre les "maladies tropicales"" et "parmi ces derniers, plus de la moitié ont été élaborés à l'origine pour un usage vétérinaire", c'est-à-dire probablement pour le marché de l'agro-alimentaire...
Quel gâchis!