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Leur société
Quand le gouvernement «découvre» les sans-abri...
Le 9 août, la ministre déléguée à la Cohésion sociale a annoncé une série de mesures pour les sans-abri parisiens, afin de régler «l'affaire des tentes de SDF».
En effet l'hiver dernier, à Paris, Médecins du Monde a distribué 300 tentes à des sans-abri, entre autres dans le but d'alerter l'opinion publique sur leur détresse. Des campements sont alors apparus un peu partout dans Paris: aux abords du canal de l'Ourcq et du canal Saint-Martin, sur les quais de Seine ou sur certains grands boulevards. Puis, à leur tour, des particuliers ont offert des tentes, si bien qu'on en compte, à présent, près de 500.
La presse s'est alors un peu intéressée aux SDF installés sous les tentes, révélant le jeune âge de la majorité d'entre eux (entre 25 et 40 ans), la longue durée de leur situation (beaucoup vivent dans la rue depuis cinq à dix ans), et surtout le fait que 20% d'entre eux sont des travailleurs pauvres, parmi lesquels de nombreux intérimaires qui touchent un salaire mais n'ont pas pour autant les moyens d'avoir un logement.
Gêné, le gouvernement a bien dû faire mine de s'intéresser au problème. La ministre déléguée à la Cohésion sociale vient de promettre une enveloppe de sept millions d'euros, pour financer quelques mesures. Parmi elles, la mise à disposition de 170 places «dans le parc HLM ou dans des foyers» pour accueillir des sans-abri; la transformation de centres d'hébergement de nuit en centres ouverts en continu; et, dans ces centres, la création de 1100 places «d'ici la fin de l'hiver 2007», autrement dit pas pour tout de suite.
Des associations, comme Emmaüs ou comme la Fnars (Fédération nationale des associations d'accueil et de réinsertion sociale), considèrent ces mesures comme un simple effet d'annonce. D'abord, parce que le nombre de 1100 places promises est dérisoire, quand on estime entre 2000 et 10000 les SDF parisiens. Ensuite, parce que, selon la Fnars, «sur les 1100 places annoncées, plus de 900 existent déjà», la plupart d'entre elles ne correspondant pas à des créations nettes. Et les réserves de ces associations sont fondées.
Il semble, en effet, que le principal souci du gouvernement soit de faire disparaître au plus vite... ces tentes qui font scandale! Mais le problème des sans-abri ne disparaîtra pas pour autant.
Selon l'Insee, il y a, au total, en France, 86000 personnes (dont 16000 enfants!) recensées comme sans-abri, c'est-à-dire condamnées à survivre sans le minimum de confort et de dignité que procure un toit. Là est le véritable scandale. Car si un nombre croissant de personnes se retrouvent à la rue, au chômage ou sans un emploi leur permettant vraiment de vivre et, dans la foulée, privées de logement, à qui la faute, si ce n'est à ceux qui imposent les contrats précaires, les licenciements et les fermetures d'usines?
Et à qui fera-t-on croire que, dans la France de 2006, il serait impossible de trouver les ressources pour loger correctement ces 86000 personnes qui dorment dans la rue?