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Leur société
Taxation des billets d'avion : Un vol sans compensation
La taxe sur les billets d'avion, chère à Chirac et censée permettre l'accès des malades des pays pauvres aux médicaments contre le Sida, la tuberculose et le paludisme, prend effet samedi 1er juillet. En classe économique, les billets seront taxés d'un euro supplémentaire pour les vols intra-européens et de 4 euros pour les vols internationaux; en première classe et en classe affaires - celles qu'utilisent les touristes fortunés et les cadres et dirigeants dont les voyages sont payés par leurs entreprises - la majoration sera, respectivement, de 10 et 40 euros.
Pour la France, l'opération devrait rapporter 200 millions d'euros et, pour l'ensemble des quatorze pays qui se sont associés à l'opération, autour de 2 milliards. Ils devraient alimenter une centrale d'achats mondiale, la «Facilité internationale d'achat de médicaments», encore appelée «Unitaid» qui a pour objectif d'arracher des prix de gros aux laboratoires de l'industrie pharmaceutique. Rien ne précise les prix que ces derniers consentiront à leur accorder. Pas plus que ne sont précisées les modalités selon lesquelles ces médicaments pourraient être distribués à ceux qui subissent, aux fins fonds de l'Afrique et des pays les plus pauvres, les ravages des épidémies de Sida, ou les méfaits de la tuberculose et du paludisme.
De par le monde, 6 millions de malades du Sida ont un besoin urgent de médicaments. Seuls 1 million d'entre eux y ont accès, les autres, majoritairement dans les pays les plus pauvres, attendent...
La tuberculose, qu'on sait guérir avec des médicaments qui n'ont rien de nouveau, fait deux millions de morts par an, là-aussi dans les populations les plus démunies. Quant au paludisme, chaque année, il touche 400 millions de personnes dont près de 80% en Afrique sub-saharienne et tue entre 1,5 et 3 millions de personnes... faute d'utilisation des moyens de prévention et de traitement déjà existants et faute de recherches sur des moyens plus efficaces puisque les populations concernées ne sont pas solvables.
Alors, les deux milliards d'euros récoltés par la taxe sur les billets d'avion, quand bien même ils parviendraient à ces dizaines, voire centaines de millions de malades qui en ont besoin, ne seraient qu'une goutte d'eau dans l'océan de leurs nécessités!
Douste Blazy, ministre des Affaires étrangères et ancien ministre de la Santé a eu le culot de déclarer que «Unitaid» représente un premier pas dans «l'humanisation de la mondialisation». Avec ses semblables, dont Kouchner, lui aussi ancien ministre de la Santé mais se disant de gauche, il en a appelé au soutien de la population, et le ballon de foot «Unitaid» paraît à chaque match de la Coupe du monde. Tous ces politiciens sont bien placés pour savoir que la survie des populations les plus pauvres de la planète ne dépend pas d'une négociation pour baisser le prix des médicaments. Ils savent que rien qu'en imposant aux trusts de l'industrie pharmaceutique de vendre ces traitements à prix coûtant de fabrication, on pourrait enrayer l'hécatombe. Mais entre leurs amis des conseils d'administration des grandes entreprises et les pauvres qui sont terrassés par des maladies qu'on sait pourtant soigner, ils ont choisi leur camp.