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- Lutte ouvrière n°1974
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Dans les entreprises
Thalès – Cholet (Maine-et-Loire) : La direction organise la précarité
Thalès (ex-Thomson CSF) est implanté depuis 70 ans à Cholet. Et pendant longtemps, en comparaison des bas salaires du textile et de la chaussure de la région, il avait une image de «bonne boîte», avec des salaires plus confortables qu'ailleurs.
Travaillant jusque dans les années 1970 pour les marchés protégés des communications militaires, son effectif a atteint 2100 personnes en 1975. Une grève des OS a marqué ces années et a permis d'assurer pendant quelques années une meilleure progression salariale.
En 1981, la gauche «nationalisait» Thomson CSF. Gomez, le PDG d'alors, parlait déjà de rentabilité à deux chiffres. On a connu surtout les licenciements à trois chiffres, puisqu'en 1987 c'est 150 licenciements secs qui étaient annoncés, licenciements qui allaient marquer les esprits pour longtemps.
Depuis, c'est la politique des grands groupes qui s'applique: réduire toujours plus la part de la main-d'oeuvre. Tout est fait pour faire fabriquer ailleurs par l'«essaimage» de services entiers: ateliers de mécanique, puis circuits imprimés, emballage, informatique, entretien, service des appareils de mesure. Et ce n'est que la partie visible, car de nombreux sous-ensembles sont achetés au lieu d'être fabriqués sur place.
À ces «externalisations», s'ajoute la création d'un volant de plus en plus important d'intérimaires: 150 sur un effectif total actuel de 800 salariés. Que les bénéfices aillent à tel ou tel patron, ce n'est pas notre problème. Mais quand il y en a deux qui s'engraissent sur notre dos, cela n'arrange rien. D'autant que tous ces changements se font au détriment des salariés «essaimés» ou précaires, qui n'ont jamais retrouvé les conditions antérieures de travail et de salaire.
Thalès utilise un volant d'intérimaires, formés aux métiers de l'électronique, qui cumulent les contrats en n'étant pas assurés, le jeudi, de revenir le lundi suivant. La «prestation de services» est aussi largement utilisée. Ce mode de travail ne déplaît pas à de jeunes ingénieurs, mais aller de Nantes à Toulouse en passant par la région parisienne pour des missions de quelques mois, cela devient vite insupportable.
La précarité, ce n'est donc pas que le CPE. Les patrons misent sur la dispersion des salariés en une multitude de sous-traitants et intervenants. Et ils aimeraient bien nous diviser au nom d'un «patriotisme d'entreprise». Mais celui-ci est aussi nocif à la classe ouvrière que le patriotisme tout court. C'est la solidarité, en particulier en cas de conflit, entre salariés de toutes ces entreprises qui doit être plus que jamais à l'ordre du jour.