Histoire de fêter à sa manière le quatrième anniversaire du 21 avril 2002, date de la dernière élection présidentielle, Sarkozy s'est exprimé devant 2000 nouveaux adhérents de l'UMP, réaffirmant sa stratégie électorale pour celle à venir en 2007. Il n'aura pas surpris en se posant en leader d'une droite qui donne de la voix et de la matraque pour tenter de récupérer ses brebis égarées du côté du Front National. Mais pour corriger l'image de conciliation, voire de faiblesse, qu'il aurait pu donner à l'électorat de droite à l'occasion de la crise du CPE, Sarkozy en a encore rajouté.

En préambule, il a affirmé que «ne pas avoir le courage de parler, c'est faire le lit des extrêmes», ce qui visiblement ne l'empêche pas de se glisser dans celui de l'extrême droite. En voici quelques morceaux choisis: «Il y a encore quelques années, vous prononciez le mot [d'immigration] et déjà vous étiez un raciste.» Prononçons donc le mot haut et fort! «Au nom de quoi les États-Unis, l'Australie, le Canada, l'Angleterre, l'Allemagne et tant d'autres choisiraient les meilleurs étudiants, les meilleurs travailleurs et nous nous n'aurions le droit de choisir personne pour subir tout le monde? Cette politique, ce n'est pas la mienne.»

Rappelons à Sarkozy et à ses émules que ces pays, s'ils sont des modèles, le sont surtout parce qu'ils sont dans le peloton de tête des pilleurs qui, au travers des multinationales, raflent les richesses de la planète. Ils récupèrent donc bien plus que les meilleurs étudiants. Et avant cela, les États-Unis par exemple ont utilisé des hommes et des femmes venus d'Afrique comme esclaves, pour ensuite les considérer comme des sous-citoyens, dans le cadre d'une ségrégation qui a existé officiellement jusqu'en 1964. Prétendre que les employeurs qui prospèrent sur l'exploitation des immigrés, sans papiers ou non, «subissent» quoi que ce soit, c'est un abus de langage, délibérément choisi par Sarkozy.

Mais c'est dans le chauvinisme le plus crasseux, celui destiné à flatter tous les Dupont-Lajoie, que Sarkozy a donné sa pleine mesure: «On en a plus qu'assez de devoir en permanence avoir le sentiment d'être obligé de s'excuser d'être Français.» Pour finir sur le classique: «S'il y en a que cela gêne d'être en France, qu'ils ne se gênent pas pour quitter un pays qu'ils n'aiment pas.» De Villiers a immédiatement protesté, dans le Journal du Dimanche, accusant Sarkozy de plagiat. Dans le marigot de la xénophobie, on trouve plus d'un crocodile.

Sarkozy a également affirmé s'adresser «à la gauche populaire, à tous ces gens qui vivent dans les quartiers et qui ont le sentiment d'être abandonnés par la République, à tous ces gens qui ont cru au Parti Communiste». Voilà sans doute pour le volet «social», l'appel à gauche censé contrebalancer l'effet produit par les appels vers la droite.

Il n'y a pas que des rodomontades démagogiques dans les discours sarkoziens. À la parole se joint le geste. Depuis son retour au gouvernement en 2002, la droite en général, et Sarkozy en particulier, ont multiplié les mesures réactionnaires et discriminatoires à l'encontre des travailleurs immigrés. Ce dernier s'apprête à récidiver, avec le projet de loi durcissant encore les conditions pour la régularisation ou le regroupement familial.

Depuis la montée de l'influence électorale de l'extrême droite, et sous prétexte de lutter contre elle, on a vu des partis et des politiciens dits «républicains» reprendre ses thèmes à leur propre compte. Cela inclut un Chevènement lorsqu'il était ministre du gouvernement Jospin, qui a même donné son nom à une loi scélérate dans la continuité de laquelle s'inscrit celle de Sarkozy.

Démagogie xénophobe et mesures anti-immigrés s'alimentent l'une l'autre, dans un enchaînement de surenchères que seule une réaction de l'ensemble du monde du travail pourra bloquer.