- Accueil
- Lutte ouvrière n°1968
- Tchad : L’armée française soutient un dictateur
Dans le monde
Tchad : L’armée française soutient un dictateur
L'armée française, basée au Tchad, forte de plus de mille hommes, a-t-elle sauvé -provisoirement- la dictature d'Idriss Déby en repoussant l'offensive des forces militaires rebelles menée le 13avril en direction de la capitale N'Djamena?
A-t-elle une responsabilité dans la centaine de blessés civils recueillis par une antenne de Médecins sans frontières? Officiellement, non: les soldats français remplissent une «mission de dissuasion vis-à-vis de menaces extérieures» et «fournissent une aide logistique aux forces armées tchadiennes» mais, déclarent les autorités françaises, «en aucun cas», ils «ne participent aux combats». L'armée française dément également avoir bombardé les villes d'Adré et de Moudeïna, à la frontière du Soudan, et reconnaît seulement un «tir de semonce» contre «une colonne de rebelles». Il a cependant été reconnu que 150soldats français supplémentaires, stationnés habituellement au Gabon, étaient venus en renfort au Tchad.
Mais, un mois plus tôt, c'est bien l'armée française qui avait sauvé la mise au dictateur tchadien menacé d'un coup d'État, alors qu'il se trouvait en voyage en Guinée équatoriale.
Suivant les moments, le rôle de l'armée française au Tchad apparaît plus ou moins voilé, plus ou moins au grand jour. La défense des intérêts politiques et économiques de l'impérialisme français dans la région s'appuie sur Idriss Déby tant que celui-ci peut encore être maintenu à bout de bras. Des diplomates français déclaraient le 14 avril ne pas avoir de raison de changer leur fusil d'épaule, mais il était aussi question de contacts plus intenses du gouvernement français avec les «rebelles». Idriss Déby lui-même avait accédé au pouvoir en 1990 en renversant Hissène Habré, alors que celui-ci venait d'être lâché par l'armée française. Ainsi la grande majorité de la population, maintenue dans un état de pauvreté extrême, est soumise à des bandes armées rivales sans que l'armée française intervienne autrement que pour installer ou pour maintenir l'une de ces bandes et son chef au pouvoir.
Depuis trois ans, l'exploitation du pétrole au Tchad a attisé les convoitises entre Déby et ses rivaux pour le partage des miettes du butin que leur abandonnent les trusts pétroliers. Cela complique sans doute quelque peu le jeu de l'impérialisme français qui, pour s'accrocher à sa zone d'influence, constituée de ses anciennes colonies, offre sa protection au dictateur qui paraît le mieux placé pour assurer le pouvoir. Quitte à en changer le cas échéant.