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Leur société
Occupation du château du PDG de Total : Un procès où le vrai coupable est absent
Fin mars, le procès des neuf personnes qui, en décembre 2001, avaient occupé l'une des résidences secondaires de Thierry Desmarest, PDG de Total, a donné lieu à quelques échanges entre le président du tribunal correctionnel d'Auxerre et les prévenus.
Pendant deux jours, des personnalités comme les navigateurs Eugène Riguidel et Jo Le Guen, entre autres, avaient occupé le château de Montigny-la-Resle, dans l'Yonne. Il s'agissait d'attirer l'attention des médias sur la responsabilité de Total dans la marée noire catastrophique qui suivit le naufrage du pétrolier Erika en décembre 1999, et dans l'explosion de son usine AZF qui, en septembre 2001, avait fait 30 morts, 2500 blessés, détruisant ou endommageant quelque 20000 logements, dont tous les habitants sont, à ce jour, très loin d'être tous correctement relogés.
Jeudi 30 mars, les neuf prévenus comparaissaient donc pour "violation de domicile, dégradation et vol". Ils ont reconnu tous les faits qui, selon le procureur de la République lui-même, ne constituent qu'un "préjudice minime"... surtout comparés aux drames dont Total est responsable. À l'accusation de "violation de domicile" (bien qu'entrés "par la porte" comme l'a précisé un prévenu), s'ajoutait le fait d'avoir tagué les murs du château avec du pétrole ramassé sur les côtes bretonnes. Mais, répliquait un autre accusé, "on nous a bien tagué 450 kilomètres de littoral"!
Il leur était également reproché d'avoir démonté trente fenêtres et une douzaine de portes du château, afin de dénoncer "la situation que vivaient les victimes toulousaines" de l'explosion d'AZF qui, elle, a détruit portes, fenêtres, cloisons.
Enfin, le tribunal reprochait un "vol aggravé" pour la consommation de douze bouteilles de Bordeaux, prises dans la cave. Mais il s'avéra que ceux qui avaient bu le plus étaient "les gendarmes" et que, le vin ayant été consommé sur place et les bouteilles n'ayant pas quitté le château, l'accusation de vol ne tenait pas, mais seulement celle de "grivèlerie". Les accusés ont également pu préciser au cours du procès qu'ils avaient "fait la vaisselle avant de partir", mais pas remonté les volets, car Elf "ne l'avait pas fait non plus à Toulouse"!
Le tribunal lui-même ne semble donc guère convaincu qu'il y a lieu de condamner des prévenus qui revendiquent un geste militant contre les abus scandaleux de la société Elf. Le jugement sera rendu le 4 mai mais il est certain, comme le déclarait l'une des accusés, "qu'ils assument leurs responsabilités quoi qu'il en coûte, ce qui n'est pas le cas de Total".