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- Lutte ouvrière n°1964
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Editorial
La lutte contre la précarité est a l'ordre du jour
Le succès des manifestations du 18 mars, où se côtoyaient étudiants, lycéens, y compris ceux des banlieues dites "difficiles", travailleurs et parents, témoigne du fait que les salariés et les futurs salariés sont de plus en plus nombreux à vouloir mettre un coup d'arrêt à la marche vers toujours plus de précarité qu'orchestre le gouvernement.
Car si le CPE a été le détonateur, il n'est pas seul en cause. Et quand bien même Villepin accepterait de lâcher du lest sur certains points, cela ne réglerait pas le problème. À juste titre, de nombreux manifestants réclamaient également l'abrogation du CNE, qui contient la même disposition inacceptable d'une période d'essai de deux ans, pendant laquelle l'employeur peut licencier un salarié, quel que soit son âge, sans même avoir à lui donner une raison.
Plus généralement, ces deux mesures de Villepin s'inscrivent dans la longue suite des contrats "aidés" de tous genres, et des facilités données aux entreprises depuis des années pour multiplier le recours à l'intérim et les contrats à durée déterminée, qui font que la précarité s'est généralisée.
Le patronat et le gouvernement osent affirmer que c'est la mauvaise santé de l'économie qui rend de telles mesures indispensables. Mais c'est un mensonge éhonté. Pour les patrons, pour les actionnaires, l'économie se porte très bien: les grandes sociétés ne cessent d'annoncer des profits records et de distribuer des dividendes en proportion. Mais ces profits, c'est sur le dos des travailleurs qu'ils sont réalisés. Les salaires bloqués, la dégradation des conditions de travail et de vie, la généralisation de la précarité, le chômage de masse, tout cela est la conséquence de la rapacité patronale et de la politique menée par tous les gouvernements qui se sont succédé depuis trente ans et qui ont tous oeuvré au service du patronat.
Alors, il est urgent de mettre un coup d'arrêt à cette régression sociale.
Les étudiants et les lycéens qui sont dans la lutte sont bien décidés à manifester encore dans les jours prochains.
Mais c'est la classe ouvrière, sans qui rien ne fonctionne, qui représente la plus grande force sociale capable d'imposer un changement de politique. Les confédérations syndicales ont décidé d'organiser, le mardi 28 mars, en liaison avec les organisations étudiantes et lycéennes, une "journée d'action avec arrêts de travail, grèves et manifestations", comme suite aux manifestations du 18 mars. La réussite d'une telle journée ne suffirait sans doute pas à imposer ce changement de politique. Mais elle permettrait de redonner aux plus hésitants confiance dans la force que les travailleurs représentent, dans leur capacité à mener à bien la riposte nécessaire à l'offensive que gouvernement et patronat mènent sans répit contre le monde du travail.
Les dirigeants des confédérations syndicales sont plus soucieux d'être admis à négocier avec le patronat et le gouvernement que d'engager une lutte déterminée pour obtenir le retrait de toutes les mesures qui visent à généraliser la précarité. Mais, de la même manière que l'ampleur croissante du mouvement des étudiants et des lycéens a amené les dirigeants confédéraux à poser ouvertement la question du retrait du CPE, la participation massive des travailleurs à la journée du 28 sera la meilleure manière d'empêcher les directions syndicales de se contenter d'une journée d'action sans suite.
La présidente du Medef, Laurence Parisot, a eu récemment le culot de faire l'éloge de la précarité, en affirmant que "dans la vie, tout est précaire". Eh bien il est temps de démontrer, à elle et à ses semblables, que les profits tirés des travailleurs en spéculant sur la crainte du chômage pourraient eux aussi se révéler "précaires", parce que les travailleurs n'accepteront pas éternellement de voir les riches continuer à s'enrichir pendant que la plus grande partie de la population s'appauvrit.
Arlette LAGUILLER
Éditorial des bulletins d'entreprise du 21 mars