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Allemagne : La grève se poursuit dans les services publics
En Allemagne, la grève des employés du secteur public contre l'augmentation du temps de travail de 38 h 30 à 40 h par semaine est entrée, le lundi 19 avril, dans sa septième semaine. Il s'agit désormais de la plus longue grève dans ce secteur depuis 80 ans. La durée de ce conflit s'explique par l'intransigeance affichée par les pouvoirs publics, malgré les compromis que Ver.di, la fédération syndicale des travailleurs des services qui dirige le mouvement, est prêt à accepter.
Ainsi à Hambourg, après trois semaines de grève, le syndicat a signé un accord prévoyant un temps de travail différent pour chacun, en fonction de ses revenus, de sa situation familiale et de son âge, avec une moyenne à 38,8 heures. Cet accord n'a été accepté que par 42% des syndiqués, mais cela a suffi, car selon les statuts du syndicat il fallait une majorité de 75% pour le rejeter!
Mais, dans la majorité des Länder et des communes, l'intransigeance des pouvoirs publics se maintient. Derrière celle-ci, il ne s'agit pas seulement d'imposer l'allongement du temps de travail, mais aussi de remettre en cause le principe même d'une convention collective unique pour tous les employés des services publics. Lors de la réforme entrée en vigueur l'an passé, et acceptée par Ver.di, les employés de l'État fédéral et des communes ont déjà vu, pour la première fois, leur salaire dépendre en partie de leurs "performances" individuelles, et plus de leur ancienneté. Mais les Länder ont refusé ce cadre commun, qui était pourtant favorable aux employeurs. En prétendant que leurs caisses étaient vides, ils ont exigé d'augmenter le temps de travail à au moins 40 heures par semaine.
En réalité les responsables des Länder, dont les pouvoirs ont été récemment renforcés par une "réforme" du fédéralisme, veulent pouvoir faire ce qu'ils veulent chacun de leur côté. Cela ne peut que conduire à des accords différents d'un Land à l'autre et accroître les inégalités de traitement entre les Länder riches et ceux qui le sont moins; et aussi à diviser les salariés, confrontés à des conditions de travail et de rémunération de plus en plus différenciées. Par exemple en Basse-Saxe 28,8% des salariés du Land travaillent déjà 40 heures par semaine.
Mais les autorités veulent aussi faire une démonstration de force. Le responsable des négociations pour les Länder, Hartmut Möllring, ministre des Finances du Land de Basse-Saxe, estime que les concessions qu'il veut imposer ont une "fonction pilote" pour l'économie. Et les Unions patronales voient dans cette grève une occasion d'infliger une défaite non seulement à Ver.di mais aussi à l'ensemble des syndicats, et d'être ainsi en meilleure situation pour continuer à démanteler, dans tous les secteurs, les accords et conventions collectives qui protègent encore un peu les salariés.
En ce sens, le combat engagé concerne tous les travailleurs, au-delà des seuls services publics. C'est le cas en particulier des mineurs, confrontés à une nouvelle vague de licenciements. Ou encore des métallurgistes, dont la convention collective est arrivée à expiration, et dont les premières grèves pour obtenir des augmentations de salaire pas trop minables sont prévues à partir du 29 mars, date de l'expiration officielle de la période de "paix sociale" dans ce secteur.
Tout en expliquant qu'il a, grâce à sa caisse de grève, les moyens de poursuivre le mouvement pendant un an, Ver.di a annoncé un changement de stratégie. Il ne prévoit plus de grève illimitée mais des "actions ponctuelles et flexibles". Mais recourir à des actions ponctuelles, c'est en fait se donner moins de moyens de faire reculer les possédants et les politiciens à leur service. Au contraire, il serait nécessaire d'agir pour que la grève s'étende aux différentes catégories de travailleurs, et de montrer que, si les pouvoirs publics persistent dans leurs attaques, la colère qui existe dans le monde du travail peut exploser et devenir incontrôlable.