Le CPE : "Mieux que rien", ou pire que tout?15/03/20062006Journal/medias/journalnumero/images/2006/03/une1963.jpg.445x577_q85_box-0%2C104%2C1383%2C1896_crop_detail.jpg

Leur société

Le CPE : "Mieux que rien", ou pire que tout?

Le Premier ministre a peut-être battu des records d'audience lorsqu'il a défendu son contrat première embauche devant les téléspectateurs mais cela est loin de signifier qu'il est compris et encore moins approuvé par la population. Les mouvements dans les universités et dans certains lycées, les manifestations, la détermination des jeunes opposés au CPE et la sympathie d'une grande partie de la population laborieuse continuent de plus belle, encouragés par l'obstination de Villepin.

La pauvreté confondante de ses arguments n'aura convaincu ni les jeunes manifestants, ni leurs parents inquiets des 23% de chômage chez les 16-24 ans, ni les "partenaires sociaux" appelés à colmater quelque peu par la "négociation" les aspects les plus inquiétants du CPE, ni même semble-t-il les "amis" politiques de Villepin, dont d'aucuns guettent la faute. Malgré "beaucoup de malentendus, de confusion et d'incompréhension", selon son promoteur, le CPE reste "une bataille sans précédent pour l'emploi". Filant la métaphore guerrière, Villepin persiste dans la provocation en demandant: "Est-ce que nous cédons à la peur, est-ce que nous revenons en arrière?"

Villepin voudrait faire passer les manifestants anti-CPE pour des privilégiés qui ignoreraient la réalité catastrophique vécue quotidiennement par les jeunes chômeurs, et leur opposer les jeunes des cités populaires, "à quelques dizaines de kilomètres des amphithéâtres de la Sorbonne", selon un quotidien. Ces derniers seraient satisfaits, nous dit-on, que le gouvernement s'attaque au problème et prêts à se saisir même d'un CPE s'il représente une porte de sortie.

Qu'un jeune qui recherche un premier emploi préfère ce CPE au chômage, c'est évident.

Mais il n'y trouverait pas plus de sécurité qu'avec un emploi en intérim, ou qu'avec un contrat à durée déterminée, que l'employeur ne peut légalement pas rompre en cours de route. Et il n'aurait pas droit aux 10% de prime de précarité qui accompagnent ces contrats.

Aurait-il l'occasion d'acquérir une petite expérience professionnelle? Ni plus ni moins qu'avec toutes les autres formes déjà existantes de contrats précaires.

Avec le CPE, les jeunes pourront galérer de contrat de deux ans en contrat de deux ans jusqu'à vingt-six ans. Quant à obtenir un crédit bancaire pour payer la caution d'un logement, il faut être aussi menteur que les promoteurs du CPE pour prétendre que ce sera plus facile.

En fait, le CPE ne créera pas d'emplois en plus car les patrons n'embauchent que lorsqu'ils en ont besoin. En revanche, il leur permettra, s'ils ont besoin d'embaucher, de le faire en bénéficiant d'une main-d'oeuvre licenciable à tout moment.

Les seuls gagnants seraient donc, sur tous les plans, les patrons. Les responsables du patronat de la métallurgie, l'UIMM, ont d'ailleurs tenu à manifester leur soutien au CPE, car il permettrait d'après eux de "vérifier si l'emploi qu'on propose [aux jeunes] est durable". Tout un programme en matière de précarité!

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