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Dans le monde
Allemagne : Salaires en baisse et mensonges patronaux
Le gouvernement de "grande coalition" entre la droite et le Parti Social-Démocrate à peine mis en place, l'offensive patronale contre le monde du travail a repris en Allemagne.
Une série de statistiques récentes est venue montrer ce qu'il en est réellement des salaires allemands dont les patrons ne cessent de répéter qu'ils sont trop élevés.
Les chiffres publiés par l'Office fédéral des statistiques font ainsi état, pour l'année 2005, d'un recul des salaires de 0,3% sur l'année... alors que, dans le même temps, l'inflation a été marquée par une nette accélération: l'indice des prix à la consommation a progressé de 2% en rythme annuel, soit la plus forte progression depuis cinq ans. Cette baisse des salaires n'est d'ailleurs qu'une moyenne qui inclut l'ensemble des salariés y compris les cadres supérieurs, dont les revenus sont loin de chuter. Cela donne donc une idée du recul du pouvoir d'achat des classes populaires.
Autre résultat: la part des rémunérations des salariés (salaires et traitements) dans le revenu national a diminué de 0,5% l'an passé. C'est la première fois que cela se produit depuis la réunification allemande en 1990. Pendant le même temps, la part des revenus provenant des entreprises et du patrimoine a progressé de 6,1%.
S'appuyant sur des enquêtes du ministère du Travail et des Affaires sociales, le journal d'extrême gauche Rote Fahne (Drapeau rouge) indique de son côté que, entre 1991 et 2004, la productivité des entreprises dans l'industrie a plus que doublé: le chiffre d'affaires par salarié est passé de 113 113 euros à 236 637euros, soit une progression de 109,2%. ! Cependant les salaires nets, eux, n'ont augmenté que de 27% pour atteindre 17 390 euros annuels en 2004, en moyenne. Ramenés aux prix de 1991 -c'est-à-dire en tenant compte de l'inflation - ils n'ont progressé que de 277euros... soit seulement 2% au-dessus du niveau de 1991.
Tout cela n'est guère étonnant, étant donné la politique patronale et gouvernementale (institution des petits boulots sous-payés, généralisation de la précarité, dénonciation d'accords salariaux comportant quelques avantages, etc.). Et cela n'empêche pas la bourgeoisie de poursuivre ses attaques, en vitupérant toujours plus contre le "coût du travail", soi-disant trop élevé. Cela se fait avec la complicité de la plupart des dirigeants syndicaux, qui acceptent recul sur recul sous le prétexte de "préserver l'emploi". Cela été le cas, dans la période récente, de l'accord tarifaire signé dans le secteur des hôpitaux communaux, où la fédération syndicale des services, Ver.di, a accepté une baisse des salaires de 6%, "compensée" par la création d'une participation des salariés au capital. En réalité les futurs investissements seront ainsi financés par les salariés eux-mêmes et plus par les employeurs!
Autre exemple: l'hôpital Krupp d'Essen vient, début janvier, de changer de statut: il est passé sous le contrôle de l'Œuvre diaconale (qui dépend de l'Église protestante). Résultat: ce n'est plus le droit général qui s'y applique... mais celui qui régit les Églises. Conséquence: le Conseil d'entreprise est dissous et les salariés dépendent d'une nouvelle convention collective (avec des salaires en moyenne inférieurs de 15% aux précédents).
Enfin, dans le commerce de détail, l'accord salarial qui vient d'être signé pour deux ans ne prévoit qu'une hausse de salaires de 0,4% au 1er décembre prochain.
Bref, le cynisme avec lequel les employeurs, privés comme publics, foulent aux pieds les acquis obtenus dans le passé n'a pas de bornes. Mais rien ne dit que les travailleurs allemands accepteront encore longtemps sans réagir.