- Accueil
- Lutte ouvrière n°1949
- Peugeot – Sochaux : 670 licenciements d'intérimaires et de CDD
Dans les entreprises
Peugeot – Sochaux : 670 licenciements d'intérimaires et de CDD
L'usine Peugeot de Sochaux compte 13900 salariés. Deux types de voitures y sont fabriqués: la 307 et la 607. Chaque jour 1915 voitures sortent des chaînes de fabrication. L'effectif ouvrier est de 8570, dont 4892 en fabrication, auxquels s'ajoutent 747 intérimaires et 621 CDD, dont près de la moitié viennent d'apprendre leur prochaine mise à la porte.
Le patron pleure la bouche pleine
Mi-novembre, le PDG de PSA annonçait au journal Die Welt que les ventes du groupe augmenteront cette année et pour la dixième fois consécutive. Les profits engrangés par PSA s'élèvent à 6,9 milliards d'euros rien que pour les cinq dernières années.
Dans les usines d'Aulnay, Poissy, Mulhouse et Sochaux, le son de cloche n'est pas le même. Les directions parlent de baisse des ventes pour tenter de créer un climat d'inquiétude. C'est dans ce contexte que PSA a profité de la vulnérabilité des contrats précaires pour jeter sur le pavé 540 intérimaires à l'usine de Citroën Aulnay, fin octobre 2005, 550 à Peugeot Poissy d'ici à la fin de l'année, 400 à Peugeot Mulhouse et maintenant à l'usine de Peugeot Sochaux, 670 ouvriers intérimaires et en CDD, fin février 2006.
À l'usine de Sochaux, la direction prend comme prétexte la fin de la fabrication de la 307 pour tenter d'imposer à l'ensemble des ouvriers sa façon d'organiser la baisse de production, qui passera à 1550 voitures par jour, début 2006. Mais, craignant les réactions possibles, elle promet la carotte après le bâton en annonçant que dans 12 à 18 mois, avec le lancement d'un nouveau véhicule, la production repartira à plein régime, qu'elle rappellera les intérimaires et les CDD pour une embauche en CDI! Cette manoeuvre grossière n'a échappé à personne et elle a fait dire à nombre d'ouvriers intérimaires et CDD que "le loyer, le boucher, les factures, c'est tout de suite qu'il faudra continuer à les payer!"
Lors des informations dans les ateliers, les chefs répercutent le discours du patron, disant qu'avec les travaux d'autoroutes et du TGV prévus dans la région, il y aura du travail. Des intérimaires ont réagi en disant: "Après le travail en chaîne, on nous propose d'aller casser des cailloux, c'est ça?" D'autres quitteront la réunion sans mâcher leurs mots pour exprimer leur colère. De nombreux jeunes disent que "le patron nous prend pour des numéros", et ajoutent: "Nous sommes la variable d'ajustement de la production."
Un discours qui sonne faux
Et puis, vu les milliers d'ouvriers intérimaires qui sont passés à l'usine sans être embauchés depuis plusieurs années, tout le monde sait à quoi s'en tenir quand la direction dit: "On vous rappellera quand ça repartira"! Dans la presse locale, le directeur du site n'en est pas à un mensonge, ni à une manoeuvre de division près en déclarant: "C'est pour protéger l'emploi des 15000 embauchés qu'on renvoie 670 ouvriers en contrats précaires." Et d'ajouter: "Nous aurions pu rayer d'un trait tous les emplois temporaires, si nous ne le faisons pas c'est parce que cela aurait été préjudiciable en terme de maintien des compétences."
Ces mensonges n'abusent personne puisque 2400 emplois d'ouvriers de fabrication en CDI ont été supprimés entre 1999 et 2004, avec une production qui a quasiment doublé, passant de 250000 voitures fabriquées en 1999 à 423000 fin 2004!
Avec la baisse de production, la direction prévoit l'arrêt d'une équipe. Les 670 ouvriers intérimaires et en CDD, dont certains avaient déjà fait 11 ou 18 mois d'intérim à l'usine, perdent l'espoir de pouvoir enfin décrocher l'embauche. Pour les 700 autres qui resteront, aucun engagement n'a été pris non plus.
Pour les 500 ouvriers concernés par l'arrêt de leur équipe, le quotidien va être chamboulé, parce que le changement d'horaires posera des problèmes pour la garde des enfants, par exemple. Avec les changements de postes de travail, bien des ouvriers ne sont pas satisfaits et se demandent où ils vont atterrir, vu leurs restrictions médicales, leur maladie professionnelle, dues aux rythmes intensifs de la production et aux gestes répétitifs.
Les ouvriers de plus de 50 ans qui occupent des postes pénibles en chaîne voient aussi que le renvoi de centaines de jeunes ouvriers signifie que le patron ne veut pas financer des préretraites et veut les maintenir en chaîne jusqu'à 60 ans. Enfin, les ouvriers de l'usine savent que baisse de production ne signifie nullement réduction de leurs charges de travail, au contraire.
De nombreux sous-traitants travaillent pour Peugeot, avec eux aussi des centaines d'ouvriers intérimaires dans les ateliers qui ressentent l'annonce des 670 suppressions d'emplois à Sochaux comme une menace pour leur propre emploi.
Cela se passe dans un contexte où des emplois à la périphérie de Sochaux sont directement menacés: il y a Burgess Norton dont les 70 travailleurs occupent leur usine de fabrication des axes de pistons. Il y a aussi l'annonce de 40 licenciements à Trevest, l'usine de fabrication des panneaux extérieurs de portes. Ça discute beaucoup dans les ateliers, des manifestations sont annoncées, mais beaucoup de militants ressentent le besoin d'un mouvement d'ensemble de tous les travailleurs sur l'emploi et les salaires, et contre le travail précaire.