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- Lutte ouvrière n°1937
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Leur société
Le mandat des élus du personnel porté de 2 à 4 ans : Toujours moins de contrôle des travailleurs
C'est en douce, en juillet, à l'image de ce qu'il a fait avec les ordonnances, que le gouvernement, par une grossière manoeuvreparlementaire, a modifié les conditions d'élection des représentants du personnel dans les entreprises, portant de deux à quatre ans la durée des mandats des délégués du personnel, des comités d'établissement et des comités d'hygiène et de sécurité, les CHSCT.
C'est à propos d'une loi censée moderniser les PME, donc sans rapport avec les droits syndicaux, qu'un sénateur a proposé un amendement modifiant dans toutes les entreprises les conditions d'élection des élus du personnel. Le gouvernement a donné son accord. L'amendement a donc été intégré dans la loi votée fin juillet et publiée au Journal Officiel, après accord du Conseil constitutionnel, dès le 3 août.
La seule concession du gouvernement a été de dire, quand même, que les mandats en cours viendraient à expiration à leur date prévue. Ce n'est qu'à l'occasion des nouvelles élections que l'allongement des mandats des élus devrait entrer en application.
En 1936, au moment de leur mise en place à la suite de la vague de grèves, les délégués du personnel, étaient élus pour un an, par atelier et restaient sous le contrôle de leurs électeurs. C'est en 1944-1945, à la fin de la guerre, alors que le PCF participait au gouvernement et prônait de "produire d'abord et revendiquer ensuite", qu'a été institué le monopole des syndicats dits représentatifs sur les candidats délégués. Par ailleurs étaient mis en place des comités pour encourager la production, qui allaient devenir les comités d'entreprise. Ceux-ci, qui n'avaient pas de mission revendicative, étaient élus pour deux ans. Ce n'est qu'à partir de 1993 que les délégués du personnel ont été désignés au cours de la même élection que les délégués au CE et eux aussi pour une période de deux ans.
En fait les délégués sont donc le plus souvent choisis par les seuls syndicats considérés comme représentatifs, qui ont le monopole des candidatures. Mais les travailleurs peuvent au moins sanctionner par leur vote l'attitude de certains syndicats, en particulier dans le cadre des conflits dans l'entreprise. Mais avec des délégués élus pour deux ans au lieu d'un, puis quatre ans au lieu de deux, ceux-ci seront encore plus éloignés de tout contrôle. Ce qui évidemment arrange les employeurs.
La CGT, de son côté, a protesté contre cette modification, car même dans le jeu des rapports de force entre syndicats, les choses risquent de devenir inamovibles. Quant aux entreprises sans représentation syndicale, ou bien où celle-ci est faible, cet allongement des délais laisse tout loisir au patron de manoeuvrer pour empêcher que les élections permettent une libre expression des salariés, en sachant qu'ensuite il sera tranquille pendant quatre ans. Dans cette période bien des choses peuvent changer ou des salariés être licenciés.
Voilà donc un service de plus que le gouvernement vient de rendre au patronat. Les patrons se réjouiront moins quand ils auront à faire à une représentation directe et vraiment démocratique des travailleurs en lutte, que ceux-ci ne manqueront pas de se donner dans leurs combats à venir.