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Leur société
Les maladies professionnelles sous-estimées
Les statistiques existant sur les maladies d'origine professionnelle sont loin de rendre compte de l'ampleur du phénomène. On l'a vu dans le cas de l'amiante, où des dizaines de milliers de malades ou leurs parents peinent à faire reconnaître le caractère professionnel du cancer causé par l'exposition à cette matière.
Afin de rejeter la culpabilité sur les victimes, les entreprises invoquent hypocritement le rôle qu'auraient pu avoir aussi l'alcool ou le tabac.
Le nombre de victimes de maladies professionnelles recensées par la Sécurité sociale n'en explose pas moins, passant de 15000 en 1997 à 45000 en 2003. Mais un rapport récent confirme ce que bien des travailleurs constatent au quotidien: les maladies professionnelles sont sous-déclarées. Par exemple, seulement 1500 cancers professionnels sont reconnus chaque année; or l'Institut national de veille sanitaire estime qu'il y en a en fait 14000 à 28000 par an! Un trouble musculo-squelettique sur deux seulement serait reconnu, sans parler des maladies liées au stress, etc.
Les raisons de la sous-déclaration sont notoires. Les maladies non reconnues sont prises en charge par le régime général de l'assurance maladie, donc par les assurés. En revanche, comme les accidents du travail, les maladies professionnelles sont couvertes par une autre branche (AT-MP), qui en principe doit être alimentée par les cotisations des employeurs. D'où d'innombrables pressions sur les salariés pour que leur maladie professionnelle ne soit pas déclarée, sans compter les dénégations des entreprises concernées: chaque maladie non reconnue représente un gain pour le patronat, tout en creusant de façon considérable le fameux trou de la Sécu. Au total, selon la CGT, le coût des maladies professionnelles et des accidents du travail non reconnus serait de 15 milliards d'euros pour le budget de la Sécurité sociale.
Le journal L'Humanité (11août) cite l'exemple d'un mécanicien d'Air France victime d'une leucémie causée par le benzène inhalé dans les réservoirs de carburant des avions: les médecins du travail d'Air France connaissaient les risques, mais la compagnie nie en bloc. Le benzène, dont les dangers sont connus, est toujours utilisé dans les carburants automobiles, et les travailleurs du pétrole, des stations-service, les garagistes, les ouvriers d'entretien de matériel agricole ou aéronautique y sont donc exposés.
Bref, nombre d'entreprises ne se contentent pas d'exploiter leurs salariés au péril de leur santé et de leur vie, elles veillent aussi à ce que cela ne leur coûte pas un sou.