Eau et agriculture en Charente : Les particuliers rationnés,les gros irriguants encouragés28/07/20052005Journal/medias/journalnumero/images/2005/07/une1930.jpg.445x577_q85_box-0%2C104%2C1383%2C1896_crop_detail.jpg

Leur société

Eau et agriculture en Charente : Les particuliers rationnés,les gros irriguants encouragés

Avec la poursuite de la sécheresse, en Charente comme ailleurs, les préfectures ont multiplié les interdictions d'arroser le jardin, de laver la voiture, de remplir une piscine et les conseils répétés d'utiliser l'eau avec parcimonie, sous peine de voir bientôt les robinets s'assécher. Des amendes menacent les contrevenants !

Mais dans les campagnes charentaises, s'étalent les champs de maïs, une céréale qui a besoin de beaucoup d'eau (450 litres d'eau pour un kilo de maïs), et qui a remplacé le blé et le tournesol, des cultures plus adaptées aux sols locaux. C'est l'État et les autorités -en l'occurrence le ministère de l'Agriculture et les chambres d'agriculture- qui ont favorisé les cultures irriguées (elles ont triplé en vingt ans) en mettant en application la Politique Agricole Commune (la PAC définie par les gouvernements sous l'égide de l'Europe). Les agriculteurs voyaient les aides de la PAC doubler en cultivant du maïs au lieu de blé (1 122 euros à l'hectare au lieu de 644). Et l'aide à la culture irriguée est de 60% supérieure à l'aide accordée à la culture non irriguée.

Beaucoup d'agriculteurs se sont mis à investir dans de coûteux dispositifs d'irrigation, faisant creuser des "bassines" (des réservoirs d'eau), installant des canalisations, des rampes, forant des puits pour pomper d'importance la nappe phréatique, ou bien des motopompes pour prélever les cours d'eau. Tout cela au grand dam du voisinage, de différentes associations (de pêcheurs, de riverains, de consommateurs...). Au point que, plus d'une fois, la préfecture et les collectivités locales ont fait mine de mettre quelques limites à cette course à l'eau, sans s'y opposer, en réalité.

Certains agriculteurs non irriguants dénoncent le fait que la PAC a favorisé ceux des agriculteurs qui étaient déjà des irriguants -et qui disposaient des revenus les plus élevés donc. Ils pointent le fait que les non-irriguants sont mis en péril.

Comme les cours du maïs sont quand même à la baisse tous les ans -ils ont baissé de 30% l'an passé- c'est la course à l'agrandissement perpétuel des exploitations et à l'acquisition de toujours plus de matériels (enrouleurs, rampes, etc.) et à l'utilisation de plus d'eau.

L'inévitable poncif, c'est que "l'Europe pousse au crime", comme l'affirme un quotidien local. Mais à y regarder de plus près et à écouter certains exploitants, on trouve des intérêts bien capitalistes. L'existence d'un lobby des gros exploitants irriguants (la plupart liés à la FDSEA) est réel, mais n'est pas seul en cause.

C'est le Crédit Agricole qui a donné sa bénédiction (et ses prêts bien rentables) à l'équipement des irriguants. Et cette agriculture intensive nécessite des volumes plus importants de semences, d'engrais et de produits phytosanitaires, fournis par les firmes de l'agro-alimentaire et de la chimie, pour qui pleuvent... les profits.

Cette campagne sur l'eau est d'une hypocrisie... de la plus belle eau.

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