Hello-Bata (57) : Un massacre de l’emploi programmé30/06/20052005Journal/medias/journalnumero/images/2005/07/une1926.jpg.445x577_q85_box-0%2C104%2C1383%2C1896_crop_detail.jpg

Dans les entreprises

Hello-Bata (57) : Un massacre de l’emploi programmé

Décembre 2001, la multinationale Bata fermait son usine lorraine. 526 ouvriers étaient licenciés, 280 repris par deux cadres Bata, les frères Werling, dans la société Hello. À leur tour, ceux-ci ont licencié 170 travailleurs en juillet 2004, et la liquidation judiciaire de l'entreprise Hello vient d'être prononcée le 22 juin, avec 93 nouveaux licenciements.

Personne ne croyait vraiment à ces repreneurs, payés par Bata pour éviter à la multinationale de licencier d'un coup plus de 800 travailleurs. Bata n'a pas fourni à Hello les commandes prévues lors de la reprise et les frères Werling se sont surtout occupés de s'enrichir dans l'affaire.

Les 93 derniers salariés d'Hello, eux, se retrouvent sur le carreau avec des indemnités conventionnelles, c'est-à-dire rien. Ce n'est pas par hasard que les repreneurs s'étaient refusés, lors de la fermeture de Bata, à s'engager à ce que les salariés repris puissent bénéficier, au cas où la reprise tournerait mal, des quelques garanties obtenues par les travailleurs de Bata après plusieurs mois de lutte, entre autres une indemnité de préjudice allant jusqu'à 15000 euros.

L'annonce de la liquidation au tribunal de commerce de Metz a été accueillie par des pleurs, mais aussi par la colère et le dégoût. Un travailleur s'indignait sur France 3 en constatant: «Les politiques prêchent l'emploi et voilà le résultat», tandis que plusieurs autres affirmaient vouloir porter plainte contre Bata qui n'a pas fourni le travail promis à Hello.

Les licenciements sont un drame: beaucoup de licenciés de Bata en 2001 sont toujours en galère ou au chômage et, sur les 170 travailleurs licenciés par Hello il y a un an, dix seulement ont retrouvé un emploi stable.

Quant à la famille Bata, elle se porte comme un charme. Originaire de Tchécoslovaquie, elle avait délocalisé sa production de chaussures aux quatre coins du monde et, au début des années 1930, vers la France. Les effectifs en Moselle atteignirent près de 2800 travailleurs à la veille de la Seconde Guerre mondiale.

En 1969, on y produisait 4,5 millions de paires à l'année. Dans les années 1980, sous prétexte de concurrence étrangère, Bata a imposé une baisse brutale des salaires. Puis elle a filialisé ses activités en France: la distribution de chaussures et les magasins d'un côté -toujours bénéficiaires aujourd'hui-, la production de l'autre. Il était facile ensuite de prétendre que la production n'était plus viable, d'autant que les magasins Bata cessaient de l'écouler!

L'administrateur judiciaire a bonne mine aujourd'hui de mettre en cause l'augmentation de «700% des importations de Chine», en ajoutant: «On ne peut pas trop rivaliser avec ça». En fait, ce sont les multinationales elles-mêmes qui font produire ailleurs pour accroître leurs profits.

En dix ans, Bata a donc supprimé 1300 emplois dans la région de Sarrebourg. De plan «social» en plan «social», l'emploi et les revenus des travailleurs ont été massacrés. La justice a fermé les yeux sur ces agissements frauduleux. Et, avec l'aide des pouvoirs publics locaux et aussi nationaux -le gouvernement Jospin était en place à l'époque du départ de Bata-, la multinationale a pu tirer l'échelle à bon compte.

Bata avait promis de verser 500000 euros pour «réindustrialiser le site». Même ça, ils ne l'ont pas fait, un petit tiers seulement a été débloqué. Mais qui ira demander des comptes à cette multinationale?

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