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Bombardier - Crespin Nord : La direction prise en flagrant délit de mensonge
Multinationale canadienne spécialisée dans l'aéronautique et le transport (plus de 30000 salariés pour sa branche transport), Bombardier a racheté en 1989 les ANF-Industries, second fabricant français de matériel roulant ferroviaire, et en particulier le site de Crespin, près de Valenciennes. Elle produit des éléments pour TGV, métros, trams, RER, TER et autorails.
En avril 2005, le site comptait 1 546 salariés en CDI et 178 intérimaires (contre 1603 et 337 six mois plus tôt). Depuis plusieurs années, la direction réduit les effectifs et ment ouvertement en prétendant qu'elle n'envisage aucun plan de réduction du personnel.
En octobre 2004, plusieurs centaines d'ouvriers empêchèrent un camion de «déménager» un outillage essentiel à la production des autorails vers l'usine tchèque de Ceská Lípa. À ce moment-là, la direction jurait déjà, la main sur le coeur, qu'aucun plan social n'était à l'ordre du jour.
Mais début juin 2005, elle était prise la main dans le sac. Les représentants CGT mirent la main sur un document strictement confidentiel intitulé «Restructuration de Crespin» datant de novembre 2004 et réalisé par le cabinet BPI, spécialisé en restructurations. Celui-ci définit le scénario très détaillé qui devait viser la suppression de 330 postes.
Rien n'y manque, en trois grandes étapes: «lobbying», «communication» et «négociation». Le décor y est planté: «Contexte de délocalisation relayé par les médias», «un ministre très impliqué localement» (Borloo, ex-maire de Valenciennes), «un président de région dans l'opposition» et «une très grande sensibilité de nos grands clients (SNCF-RATP) à la localisation en France» de la production. Les acteurs (élus et responsables des pouvoirs publics régionaux) y sont présentés avec l'interrogation: «Quels alliés? Quels opposants?» Le «climat social difficile» y est dépeint, ainsi qu'«un syndicat très revendicatif et peu enclin à la négociation» (la CGT). Le coût du Plan de sauvegarde de l'emploi (PSE) y est estimé aux alentours de 80000 à 100000 euros par salarié.
Le document conclut même que le PSE serait défendable auprès des politiques s'il ne concernait que les ETAM ou les cadres. Il conseille de présenter ce plan comme un «projet pour le progrès du site, et non comme un plan social brutal» pour préserver l'image de marque de l'entreprise sur «un marché français porteur».
Suite à la réunion de plus de 800 salariés en assemblée générale, la direction une nouvelle fois a assuré «qu'aucun plan social n'est à l'étude» et ajouté que ce n'était qu'«un scénario, des scénarios il y en a plein». C'est bien ce qui inquiète les salariés, qui se disent qu'il n'y a pas de fumée sans feu. Les dirigeants de la CGT pensent même que la direction envisage de planifier la mise en difficulté du site par une sous-production organisée de manière, cette fois-ci, à rendre ce plan «défendable auprès des politiques» même s'il touche des ouvriers.
Dans tous les cas, les mois qui viennent de s'écouler ont montré que, quel que soit le ou les plans prévus, la mobilisation des salariés a fait hésiter, voire reculer la direction. Le seul «scénario» défendable pour lui faire remballer ses projets est d'amplifier et d'étendre cette mobilisation.