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La grève à la SNCM – Marseille : Les marins en lutte pour leurs emplois
Depuis mardi 12 avril, les marins de la SNCM sont en grève contre la mise en application du nouveau registre maritime, le RIF (Registre international français) qui permettrait d'engager sur les navires pour les lignes internationales jusqu'à 75% de marins étrangers aux conditions qui sont celles de leurs pays d'origine.
Les marins craignent de se voir mis en concurrence avec d'autres qui seraient traités comme des travailleurs de seconde zone. Ils craignent surtout de voir disparaître de nombreux emplois dans la marine marchande à cause du RIF, mais aussi du fait du plan de la direction qui prévoit 210 suppressions d'emplois (ou 236 d'après la dernière lettre du président) et l'entrée majoritaire de capitaux privés dans le capital de la compagnie.
Jeudi 14 avril, les sédentaires étaient aussi appelés à faire grève avec les marins. Vendredi l'atelier votait la grève. Quant aux travailleurs du siège, situé boulevard des Dames près de la Joliette, après l'assemblée générale du vendredi matin, bien qu'il n'y ait eu ni appel à la grève, ni préavis déposé, ils se retrouvaient grévistes de fait.
Une centaine de grévistes sont allés samedi 16 avril à Nice pour retarder le départ du navire Méga-express de la société privée Corsica ferries, concurrente de la SNCM sur les lignes de la Corse. Ils se sont heurtés à de nombreux CRS. Finalement le départ du navire était retardé d'une heure. Il s'agissait de faire une action médiatique. Malheureusement, elle donnait l'impression de s'en prendre à d'autres travailleurs.
Dimanche soir, à l'issue d'une nouvelle assemblée de 250 personnes, le port de Marseille était bloqué: des engins, des conteneurs étaient placés contre les grilles, fermant les accès au port jusqu'à la porte d'Arenc.
À leur assemblée du lundi 18 au matin, les ouvriers de l'atelier se prononçaient en majorité pour faire grève. Au siège et sur les quais, pratiquement personne n'a travaillé lundi matin. L'atmosphère se faisait plus tendue du fait de la présence de nombreux cars de CRS devant le siège.
À 10 h 30, ceux-ci entraient sur le port et attaquaient à coups de grenades lacrymogènes les marins grévistes, qui se défendaient, lançaient des objets divers. Des voitures neuves qui attendaient un embarquement prirent feu. Les marins se repliaient sur le Pascal Paoli et sur le Méditerranée. Du haut des bateaux, ils mettaient en action les lances à incendie pour arrêter l'assaut. Les syndicats des dockers et du port autonome appelaient à la grève pour soutenir les marins et protester contre l'entrée des CRS sur le port. Des dockers prenaient les CRS à revers. Le secrétaire CGT des marins demandait au préfet de région le départ des CRS du port «sinon il y aurait grève de Fos jusqu'à Marseille». Les policiers quittaient le port au tout début de l'après-midi. Le PDG et ses cadres, qui déjeunaient au restaurant, étaient privés de dessert par une forte délégation qui les ramenait à leurs bureaux avec consigne de téléphoner au ministère. Personne en tout cas ne travaillait.
Mardi 19, une assemblée générale de 250 marins et quelques sédentaires se tenait dans la salle de cinéma du ferry Méditerranée. Plusieurs groupes se constituaient pour fermer la passe nord du port avec une amarre, faire le tour des bateaux pour appeler les non-grévistes à rejoindre le mouvement et mettre dehors les officiers, et pour assurer le nettoyage du bateau et préparer à manger.
Le plus difficile fut de bloquer la passe, car des policiers sur un Zodiac firent face aux matelots embarqués sur des canots de sauvetage et sur un Zodiac tandis que d'autres policiers sur la jetée s'opposaient aux grévistes venus prêter main-forte aux matelots.
Il faut souhaiter que la combativité dont font preuve les marins en grève, à peu près la moitié des 1200 marins de la compagnie, rallie à ce mouvement les autres marins et les quelque 800 sédentaires de la compagnie. Car le problème est en fait le même pour tous: c'est fondamentalement le problème des emplois. Il faut obliger la direction et le gouvernement à remiser leurs projets.