Après le 29 mai : Les nostalgiques de l’Union de la gauche22/04/20052005Journal/medias/journalnumero/images/2005/04/une1916.jpg.445x577_q85_box-0%2C104%2C1383%2C1896_crop_detail.jpg

Leur société

Après le 29 mai : Les nostalgiques de l’Union de la gauche

Se multipliant sur toutes les antennes, Jack Lang était l'invité de France Inter mardi 18 avril. Défenseur du « oui » au nom du PS, il a déployé ses talents de bateleur d'estrade, pour convaincre l'électorat du PS, et même au-delà, de rejoindre cette position du PS.

Pour cela, il a retrouvé un vocabulaire qui sonne mieux aux oreilles des électeurs de gauche: «Je suis engagé dans le combat internationaliste... C'est parce que je suis anti-impérialiste que je dis que ce traité est le meilleur rempart contre le libéralisme.... Grâce à lui... nous pourrons enfin protéger les services publics.» Comme quoi ce politicien n'a pas peur des mots, au point qu'il en use à tort et à travers. Il faut avoir un certain culot pour oser dire que ce traité constitutionnel va «enfin protéger les services publics». Car la Constitution va en réalité généraliser au niveau de l'Europe l'ouverture des services publics à la concurrence, une politique déjà largement engagée par le gouvernement Jospin, dans lequel Lang fut ministre. Jospin a accru les privatisations plus que tous les gouvernements de droite qui l'avaient précédé, Raffarin a continué sur le chemin tracé.

Lang a continué sur ce style: «Il y a une bronca contre le gouvernement... Je partage cette colère... La colère est juste, il faut même l'amplifier contre ce gouvernement. Si nous voulons lui faire la peau, ce n'est pas en juin prochain, c'est en 2007. Alors préparons-nous.» Mais à quoi? À la place du combat promis, notre valeureux héros propose de... réfléchir: «Imaginons un programme d'alternance fort et puissant.»

Pour l'avenir, c'est-à-dire pour 2007, il propose... la réflexion. Il ne prend aucun engagement, même pas celui sur lequel l'interrogeait un auditeur, d'annuler tout ce que le gouvernement actuel avait imposé à la population laborieuse: sur les retraites, l'assurance-maladie, les services publics. «Faire la peau» à ce gouvernement, selon l'expression de Lang, se limiterait donc à confier les rênes du gouvernement aux dirigeants du PS.

Cela n'est pas si éloigné, au bout du compte, de la perspective que propose Marie-George Buffet, la dirigeante du Parti Communiste Français, même si elle et son parti se présentent comme les principaux animateurs de ce qu'elle appelle le «non de gauche». On a pu le constater lors d'une émission sur France 3, où la dirigeante du PCF, qui y était présente en même temps que Lang, a rappelé qu'elle avait partagé aux côtés de ce dernier une place de ministre dans le gouvernement Jospin et que, s'ils s'opposaient aujourd'hui, il faudrait bien se retrouver à l'avenir pour gouverner ensemble.

Elle a renouvelé la même démonstration lors du grand meeting organisé par le PCF au Zénith à Paris le 14 avril, déclarant: «Les conditions sont réunies pour une grande victoire contre la droite.» Car, a-t-elle ajouté en parlant de la Constitution, «c'est un traité de droite, c'est normal que la droite le défende... Il faut que la gauche batte la droite en n'acceptant pas ce traité libéral». Tout cela pour conclure: «Nous allons prendre toutes les initiatives pour rassembler la gauche, y compris ceux qui auraient voté « oui », pour débattre de ce que doit faire la gauche demain si elle revient au pouvoir.»

«Débattre» pour Marie-George Buffet, «réfléchir» pour Jack Lang, la dirigeante du PCF va prendre dans la panoplie des mots creux chers aux dirigeants du PS pour parler de ce que ferait demain un «nouveau» gouvernement de gauche. Mais, fût-il rebaptisé «gauche de rupture» comme le dit Jack Lang, voire même «100% à gauche», l'objectif reste de remettre sur pied une nouvelle mouture des combinaisons du passé, «Union de la gauche» en 1981, «Gauche plurielle» en 1997. Ce serait la même politique voulue par les grands groupes capitalistes auxquels les dirigeants du PS sont tout aussi soumis que la droite. Ils l'ont largement montré depuis 1981.

Marie-George Buffet voudrait faire croire à tous ceux qui regardent vers le PC qu'il n'y aurait que cette issue, celle d'un gouvernement sous la houlette du PS, alors que bien des militants du PC, de ses sympathisants ou de ses électeurs gardent en souvenir les expériences amères des différents gouvernements de gauche de la dernière période. La direction du PCF martèle qu'il faut aller au gouvernement pour peser et imposer des mesures en faveur des travailleurs. C'est le même argument que ses dirigeants emploient depuis toujours. C'était le cas en 1981, mais aussi en 1997.

Mais chaque fois que le PS a accepté d'octroyer des strapontins au PCF dans les gouvernements qu'il dirigeait, c'était pour se servir de son crédit pour mieux faire accepter une politique antiouvrière et pro-patronale dans les milieux populaires. Le PC a payé au prix fort, sur le terrain électoral, le prix de sa compromission.

Ce n'est pas, comme le dit Lang, l'échéance électorale de 2007 qui permettra d'inverser le cours antiouvrier de la politique actuelle. Ce seront les réactions du monde ouvrier sur son terrain, celui des usines et de la rue. C'est là que les militants ouvriers attachés au sort de leur classe, membres du PCF ou syndicalistes, communistes révolutionnaires ou tout simplement travailleurs en colère, pourront compter gagner les batailles décisives, à la fois contre le patronat et les dirigeants politiques à son service.

Partager