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Leur société
Erika : Total doit payer !
Le procès du naufrage de l'Erika va peut-être commencer avant la fin de l'année. La cour d'appel de Paris vient en effet de refuser une nouvelle expertise, dont la réalisation aurait pu entraîner un retard supplémentaire de plusieurs années, alors que le naufrage, qui entraîna la pollution du rivage de plusieurs dizaines de communes de la côte atlantique, s'est produit en décembre 1999.
L'affaire traîne donc depuis cinq ans. Il faut dire que les accusés potentiels sont de poids: c'est pour TotalFinaElf que l'Erika transportait plus de 30000 tonnes de fuel lourd. Or, dès novembre 2001, un rapport d'expertise accablait la société pétrolière. Le navire était dans un état lamentable: sa coque présentait de fortes traces de corrosion et des fissures sur le pont étaient parfaitement décelables par l'affréteur obligé d'effectuer des contrôles. Les services de TotalFinaElf lui avaient cependant donné leur agrément, mais celui-ci prenait fin en novembre 1999. En décembre 1999, le navire n'aurait donc pas dû prendre la mer. Par ailleurs, le rapport indiquait que le commandant était totalement subordonné à la société pétrolière, qu'il ne devait communiquer qu'avec la cellule de crise de Total et que l'ampleur de la catastrophe avait été dissimulée, jusqu'au dernier moment, aux autorités maritimes.
Évidemment, TotalFinaElf avait répliqué par un autre rapport d'expert du tribunal de commerce de Dunkerque, expliquant que la corrosion se situait dans la cuve et était donc invisible pour ses contrôleurs. D'où la demande du parquet d'une troisième expertise pour départager les deux premières, demande qui ne pouvait que faire gagner du temps à Total, et qui vient d'être rejetée par la cour d'appel.
Est-ce à dire que la condamnation de Total est pour bientôt? On n'en jurerait pas. La société est mise en examen pour «pollution maritime et complicité de mise en danger d'autrui», en compagnie de dix-huit autres personnes physiques ou morales, qui vont du capitaine à l'armateur, en passant par les sociétés de contrôle et les responsables de la préfecture maritime. Mais pour le moment TotalFinaElf est bien seul à avoir été indemnisé... par les assurances qui lui ont remboursé sa cargaison. Il affirme avoir dépensé 200 millions d'euros pour nettoyer les côtes «volontairement», mais le coût réel est presque cinq fois supérieur.
On peut compter sur les avocats de la multinationale pour faire traîner les choses en longueur, d'autant plus facilement que le Parquet se montre sensible aux «insuffisances» supposées d'un dossier, quand il s'agit d'un prévenu aussi important!
Mais plus d'une trentaine de communes et des milliers de particuliers veulent qu'on les dédommage et les bénéfices faramineux de 9,04 milliards d'euros, en hausse de 23%, que TotalFinaElf vient d'annoncer, les 3,3 milliards qu'il va distribuer à ses actionnaires, ne peuvent que les renforcer dans leur conviction que Total peut et doit payer.