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Dans le monde
Élections en Polynésie : Un désaveu de la politique coloniale du gouvernement
Les élections partielles qui se sont déroulées dimanche 13 février sur la plus grande partie des territoires de la Polynésie française, toujours considérée comme "Territoire d'Outre-Mer", ont été marquées par la progression très importante de la liste indépendantiste conduite par Oscar Temaru, qui a recueilli 47% des voix.
Son avance en voix face à la liste UMP de Gaston Flosse, l'éternel chef de clan, protecteur des intérêts grands et petits de l'impérialisme français et protégé de Chirac, est passée de moins de 400 lors des dernières élections du 23 mai 2004 à plus de 6000 voix.
C'est bien là le fait marquant de ces élections, au-delà de toutes les tractations qui se sont menées et qui continuent pour savoir qui aura la direction de l'assemblée territoriale et la présidence du Territoire. Car la loi électorale est faite sur mesure pour le protégé du gouvernement, Gaston Flosse. Le découpage des circonscriptions comporte une sur-représentation de certaines zones telle qu'avec un bien plus faible nombre de voix que ses adversaires, Flosse peut avoir le même nombre d'élus. Ce sont les mêmes qui, la main sur le coeur et sans peur du ridicule, palabrent sur la démocratie et le droit des peuples pour... le "reste" du monde, c'est-à-dire à l'extérieur de leur zone de pouvoir.
Depuis les élections du 23 mai dernier, le gouvernement a appuyé sans relâche toutes les manoeuvres de Gaston Flosse pour reconquérir son poste en dépit du fait qu'il avait perdu les élections, en particulier quand celui-ci a acheté un élu pour changer la majorité dans l'assemblée, le 9 octobre 2004. Mais la population a répondu par sa mobilisation quand 30000 manifestants, soit 10% de la population totale du territoire, sont descendus dans la rue le 16 octobre pour protester contre cette manipulation. Puis, lorsque les sympathisants indépendantistes ont pris le contrôle de l'ensemble des bâtiments publics de Tahiti en commençant par la présidence, l'appui de la population a été tel que le gouvernement a choisi de ne pas faire intervenir les très nombreuses forces de police et de l'armée dépêchées dans le territoire.
Le gouvernement n'a pas désarmé pour autant et a tout fait pour sauver son ami Flosse, avec en première ligne la ministre de l'Outre-Mer, Girardin. Les négociations qui ont eu lieu à Paris ont été des faux-semblants. Le gouvernement a refusé de dissoudre l'assemblée territoriale pour organiser de nouvelles élections générales. Bien plus, il a demandé l'annulation des élections dans les seules parties du territoire, les plus peuplées, favorables à Oscar Temaru. Cette grossière manoeuvre, vraiment digne d'un pouvoir colonial, a reçu l'appui inconditionnel du Conseil d'État.
Mais rien n'y a fait: la participation aux élections a encore grimpé de 10% pour atteindre 80% des électeurs inscrits. Les porte-parole de l'UMP ont alors osé déclarer que ces élections ne servaient à rien, car la liste d'Oscar Temaru n'avait "que" 27 députés au total. C'est pourtant beaucoup, si on tient compte de la loi électorale que même l'UDF qualifie de "totalement contraire aux principes de la démocratie".
Oscar Temaru et son parti revendiquent un statut d'indépendance, mais c'est trop pour les gouvernants d'ici qui considèrent ces territoires du Pacifique comme leur chasse gardée, avec leurs bases militaires et leur zone d'essais atomiques en réserve. Mais c'est bien le moins que la population de Polynésie puisse choisir librement ses représentants et son gouvernement, sans dépendre des pressions d'un pouvoir politique et d'un État situés aux antipodes.