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Ile de la Réunion : Le racisme contre Mahorais et Comoriens, un poison qu’il faut combattre
A la Réunion, il n'est malheureusement pas rare d'entendre des propos insultants et racistes envers des membres de la communauté mahoraise et comorienne. Cette xénophobie qui se développe dans l'île est le pendant local de cette idéologie de fond de poubelle qui a fait le succès d'un Le Pen en France.
La communauté mahoraise et comorienne compte environ 30000 membres à la Réunion, soit la majorité des migrants, dont le nombre total ne dépasse pas 38000, toutes nationalités et communautés confondues. Les Mahorais (habitants de l'île de Mayotte) et les Comoriens viennent des anciennes possessions françaises des Comores, situées au nord-ouest de Madagascar.
Les hommes et les femmes issus de cet archipel, et qui sont pour beaucoup de nationalité française, fuient le manque de travail, la misère et donc des conditions de vie très difficiles. A Mayotte, qui reste aujourd'hui la seule île rattachée à la France, avec un statut de collectivité territoriale, les prestations sociales sont quasi inexistantes, le chômage bien peu indemnisé, et les salaires fort bas: le Smic est par exemple de moitié inférieur au Smic de France. Le système hospitalier est archaïque, il y a plusieurs centaines d'évacuations sanitaires par an en provenance de Mayotte. Le système scolaire est insuffisant, entre autres par l'absence d'université. Alors, beaucoup de Mahorais tentent leur chance à la Réunion, espérant vivre un peu mieux et surtout pouvoir offrir à leurs enfants un avenir meilleur.
Mais ce qu'ils y trouvent a de quoi les faire rapidement déchanter. Victimes de discriminations à l'embauche, ces travailleurs ne peuvent espérer qu'un emploi non déclaré, et encore, quand ils en trouvent un, pour effectuer des travaux pénibles et souvent fort mal payés. Pour eux, la recherche d'un logement devient vite une course d'obstacles infranchissables qui les jette dans les bras de marchands de sommeil sans scrupule.
Un bidonville s'est développé dans la ville du Port, où des familles mahoraises et comoriennes s'entassent dans des cases non seulement insalubres mais aussi propices aux incendies ravageurs, comme celui du 6 décembre 2004 qui a jeté à la rue sept familles, soit trente-deux personnes. Le 10 janvier, un autre incendie a détruit une maison de Saint-André, provoquant la mort de trois enfants. A plusieurs reprises déjà, la famille s'était plainte auprès de la société immobilière (qui n'a jamais daigné vérifier) de problèmes récurrents au compteur électrique; problèmes qui ont pu être à l'origine du drame.
La presse réunionnaise rapporte de temps à autre la situation de ces populations. Ainsi, un reportage du Journal de l'île de décembre 2004 disait les déceptions d'une Mahoraise de 35 ans qui, après la mort de son mari, était venue à la Réunion, espérant manger à sa faim et élever décemment ses six enfants. Deux ans plus tard, elle avait perdu nombre de ses illusions, vivant avec ses enfants et deux autres membres de sa famille dans un appartement immonde, qu'un marchand de sommeil lui louait 700 euros par mois: pas d'électricité, des chambres sans fenêtre, inondées à la moindre averse, une cuisine totalement hors normes, les eaux usées qui se déversaient dans le salon. «Je n'ai pas eu le choix, tous les autres propriétaires ne voulaient pas louer à une Mahoraise», expliquait-elle.
«Comores dehors», «Voleurs d'alloc»: ce sont des slogans qui se rencontrent sur des murs d'immeubles, tracés par les mains imbéciles d'un raciste notoire ou d'un Réunionnais peu conscient, qui rend responsable de sa situation un plus pauvre ou plus démuni que lui; comme si ce qui lui manquait était à prendre dans les poches de ceux qui n'ont rien.
Le racisme et la xénophobie divisent les pauvres, les détournent de leur vrais ennemis: ceux qui sont responsables du chômage, des bas salaires; ceux qui, exploitant la misère, ont intérêt à ce qu'aucune solidarité ne puisse exister.