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Leur société
Après le plan d'urbanisme de Paris : Un logement décent, c'est un droit
Les élus du Conseil de Paris viennent d'accoucher du plan local d'urbanisme censé définir ce que seront Paris et ses habitants dans les vingt années à venir. Il y est question d'espaces verts, de couloirs pour les bus et les vélos, de préservation d'immeubles anciens, de création de nouveaux logements, de qualité de vie... Mais pour qui?
Il y a une cinquantaine d'années, Paris était encore une ville populaire. Depuis, elle a perdu la plus grande partie de sa population d'ouvriers et d'employés. Ils ont été chassés par le prix des logements, vers des banlieues de plus en plus lointaines. C'est de notoriété publique. Aussi la majorité municipale -socialiste- se sent-elle obligée d'affirmer qu'une de ses priorités est de "réduire les inégalités pour un Paris plus solidaire", et son patron, Bertrand Delanoë, d'insister sur la nécessaire "mixité sociale". C'est bien gentil, mais comment les classes populaires pourraient-elles se loger à Paris?
Pas question d'acheter. Le prix moyen du m2 atteint... 3500 euros, soit la bagatelle de 210000 euros pour le moindre F3 de 60 m2. Et quand la Mairie se félicite de son prêt à taux zéro, étalant son slogan "La Ville de Paris vous aide à devenir propriétaire", elle annonce clairement à qui elle s'adresse... Ni aux ouvriers ni aux employés. D'autant que ce prêt ne peut atteindre, au maximum, que 36000 euros et que le reste, il faut l'avoir ou l'emprunter, au taux des banques.
Pas question de louer non plus. Avec un salaire ouvrier moyen -autour de 3000 euros pour un couple-, il est impossible de trouver un logement dans le secteur locatif privé. Dans les quartiers les moins chers, un trois-pièces se loue autour de 1200 euros. Et les agences immobilières exigent des revenus correspondant à quatre fois le montant de ce loyer -soit 4800 euros mensuels-, sans compter les cautions.
Reste le logement social mais là, il faut s'armer de patience. Selon la Mairie de Paris, il y a aujourd'hui plus de 100000 demandes inscrites sur les registres. Pour 90% de ces demandeurs, leurs revenus ne dépassent pas le plafond de ressources permettant l'accès aux logements sociaux. Ils y ont donc droit. Mais ils attendent, pour la plupart depuis plus d'un an et, pour certains, depuis plus de cinq ans. Alors, quand la Mairie de Paris prêche dans ses discours pour la "mixité sociale", c'est de l'esbroufe.
Des petites gens habitent encore à Paris, ceux qui ont acquis leur logement il y a longtemps ou en ont hérité, et ceux qui ont accès aux rares logements sociaux. Mais d'année en année, des travailleurs de plus en plus nombreux, y compris ceux disposant d'un bon salaire, voire des cadres, sont rejetés toujours plus loin en périphérie, délogés par l'augmentation démente des loyers et des prix de vente. C'est ainsi que, chaque matin, des centaines de milliers de salariés rejoignent par le train, le RER ou l'autoroute leur bureau, atelier ou autre lieu de travail et que, chaque soir, ils rentrent dans leurs pénates, après avoir ajouté deux à trois heures de transport et de fatigue supplémentaires à leur journée de travail.
Les travailleurs ont droit d'avoir un logement décent, pour eux et leur famille, qui soit proche de leur travail et n'impose pas pour s'y rendre une expédition quotidienne épuisante. Un salaire normal devrait permettre de se loger correctement sans que cela nécessite d'incroyables sacrifices financiers. Cela est rendu de plus en plus difficile par la pénurie de logements abordables, elle-même due au fait que la propriété immobilière devient un instrument de spéculation et d'enrichissement avant d'être un moyen de satisfaire le simple besoin social d'être logé. C'est évident à Paris, encore plus qu'ailleurs, mais ce sont tous les centres-ville qui deviennent inaccessibles aux couches populaires.
Cette question du logement, qui devient dramatique, ne se résoudra pas sans s'en prendre à la spéculation immobilière. Mais elle met aussi en lumière la baisse du pouvoir d'achat réel des salaires face à un coût de la vie qui devient exorbitant si on tient compte du prix des logements. Un pouvoir d'achat dont le rattrapage devient une question vitale.