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Corée du sud : Offensive patronale et grève générale
La centrale syndicale sud-coréenne KCTU appelait à une grève générale à partir du 25 novembre. En effet, une nouvelle fois, le gouvernement coréen veut faire passer une loi facilitant l'utilisation du travail "irrégulier", catégorie qui regroupe les précaires, intérimaires, travailleurs à temps partiel, travailleurs des entreprises sous-traitantes, travailleurs loués, etc.
Avec cette nouvelle loi, les contrats précaires pourraient durer trois ans, contre deux aujourd'hui, et être, de fait, reconductibles sans embauche; les patrons pourraient avoir recours à des sociétés de main-d'oeuvre dans presque toutes les branches (ce qui équivaut à un intérim généralisé: le patron n'embauche pas les travailleurs, il traite avec un intermédiaire qui lui loue les services des ouvriers); de plus, l'utilisation de sociétés de main-d'oeuvre ne serait plus limitée dans le temps; la notion "d'entreprise unipersonnelle" serait généralisée (on n'embauche pas un ajusteur, on fait un contrat, pour un travail donné, avec une société d'ajustage comportant un seul employé).
La KCTU, syndicat né des grandes grèves des vingt dernières années, menées contre un patronat féroce et un État répressif, affirme que le but du gouvernement est de faire des 14 millions de travailleurs coréens des travailleurs "irréguliers". Cela équivaudrait, en France, à la fin des CDI. On voit que sous toutes les latitudes les patrons procèdent selon une même inspiration.
En fait, une très grande partie des travailleurs coréens sont déjà "irréguliers". Il y a bien sûr tous ceux qui travaillent dans les petites entreprises, sous-traitantes ou non des grands trusts. Mais même sur les sites des grandes entreprises beaucoup de travailleurs sont "irréguliers". La KCTU donne le chiffre de 50% d'"irréguliers" dans la métallurgie en 2004 (contre 40% en 2002) et cite une usine dans laquelle les 800 ouvriers sont intérimaires (seuls les 150 cadres et agents de maîtrise sont embauchés).
C'est précisément parmi les ouvriers embauchés des grandes usines de la métallurgie, bien plus que parmi les "irréguliers", que la KCTU a sa base militante. C'est avant tout ses propres syndiqués que la KCTU mobilise depuis plusieurs semaines et qu'elle appelle à la grève. Ce syndicat avait déjà appelé à une grève générale, en 1998, à propos d'une loi sur les licenciements et la flexibilité du travail. Et l'avait ensuite ajournée. La loi était alors passée et le syndicat avait gagné une reconnaissance.
Quoi qu'il en soit, les travailleurs coréens, embauchés ou pas, ont tout intérêt à ne pas laisser passer cette loi et pourraient recevoir le renfort des employés d'État, qui se battent pour la reconnaissance de leur syndicat et pour obtenir le droit de grève (144 ont été arrêtés dans une manifestation dimanche 21 novembre). Dans la liste des revendications de la KCTU il y a, entre autres, le vieux mot d'ordre "À travail égal, salaire égal". Souhaitons que les travailleurs coréens, irréguliers et réguliers, s'en emparent.