"Travailler nuit gravement à la santé". Pour une fois, ce n'est pas nous qui l'écrivons, mais le mensuel Enjeux, publication du journal propatronal Les Échos. Son dossier s'appuie sur des enquêtes, dont celle de l'Institut français d'action sur le stress (Ifas) portant sur près de 13000 salariés et celle du ministère du Travail.

On y trouve un condensé de tout ce que dénoncent de plus en plus de travailleurs: les maladies professionnelles ont augmenté sans discontinuer du pourcentage énorme de 20% l'an depuis dix ans. De 1984 à 1998, parmi les salariés interrogés, la proportion de ceux qui se plaignent de postures pénibles est passée de 16% à 37%; le nombre de ceux qui dénoncent l'accélération du rythme de travail est passé de 7% à 23% et de ceux qui souffrent de gestes répétitifs, de 20 à 29%. L'article relève que, dans les centres d'appels téléphoniques, le délai entre chaque communication est de deux à sept secondes, que les horaires des caissières d'hypermarchés sont gérés de quart d'heure en quart d'heure pour éviter aux clients d'attendre et aux employées d'être trop longtemps inactives! Quant à certains ateliers de découpe de viande, ils comptent de 15% à 20% de travailleurs ayant des restrictions d'aptitudes détectées par la médecine du Travail en raison de troubles musculo-squelettiques (tendinites, douleurs aux poignets, aux épaules, etc.) au point que cela en devient "ingérable pour les contremaîtres".

Les auteurs déplorent l'aveuglement des patrons qui refusent de remettre en cause l'organisation du travail alors qu'on pourrait "combiner gains de productivité et santé au travail" comme, selon eux, mais c'est à voir, cela s'est fait aux États-Unis...

Évidemment, même après un constat sans appel, on ne s'attendait pas à ce qu'ils conseillent aux patrons de céder la place.