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Brésil : Sous Lula, pas touche à l'armée
Les militaires brésiliens ont exercé leur dictature sur le pays pendant plus de vingt ans, du coup d'État du 1er avril 1964 à la prise de fonctions du président José Sarney le 16 mars 1985. La répression fut meurtrière contre le mouvement ouvrier, les partis de gauche et les groupes guérilléristes. La transition vers un régime civil a été ensuite progressive, s'étalant sur plus de dix ans, si bien que la hiérarchie militaire ayant participé à cette répression n'a jamais été violemment mise en cause, comme en Argentine ou au Chili. Les généraux se sont faits discrets, mais se déclarent toujours prêts à "défendre la patrie" contre tout ennemi intérieur.
La dictature militaire avait fait plusieurs milliers de morts, sans compter les "disparus", dont les proches recherchent toujours les traces. Parmi ces victimes, le journaliste Wladimir Herzog, militant du PC brésilien, mort sous la torture en octobre 1975 dans une des geôles du régime. Cette mort, présentée par l'armée comme un suicide, avait provoqué les premières manifestations importantes contre la dictature.
Or "Vlado" a été reconnu, assis nu dans sa cellule, sur des photographies publiées le 17 octobre dernier par une revue. Deux jours plus tard, l'armée de terre publiait une note qui justifiait la dictature, la torture et les assassinats d'opposants "ayant choisi le radicalisme et l'illégalité", et affirmait sans gêne "qu'il ne fallait pas rouvrir des plaies qui ont besoin d'être définitivement cicatrisées".
Le président actuel du Brésil, Lula, ancien opposant à la dictature et plusieurs fois emprisonné par elle, a fait publier par le général commandant l'armée de terre aujourd'hui une note rectificative, dans laquelle il regrettait la mort de Herzog, admettant en termes extrêmement mesurés que "l'affaire n'avait pas été traitée de façon appropriée".
Le ministre de la Défense, José Viegas, a du coup demandé la démission de ce général, qui avait prétendu ne pas être au courant de la première note de l'armée, alors qu'il l'avait lue et formellement autorisée. Or c'est Viegas qui s'est retrouvé démissionné et remplacé.
Il se confirme donc que, malgré vingt ans de régime dit "démocratique", l'année brésilienne reste intouchable et n'entend pas qu'on remette en cause le rôle qu'elle a joué dans le passé. Et si elle se tait sur ses exactions, elle sait se faire entendre d'un gouvernement que l'on qualifie de gauche.